De l'argent et des hommes
Henry Ford II, en personne, donne le feu vert au projet et 1962 voit la naissance d'un Département des véhicules spéciaux. Sous la direction de Roy Lunn, un ingénieur britannique émigré aux USA, la cellule réalise un premier véhicule : la Mustang 1. Ce "dream car" se présente sous la forme d'un petit roadster à moteur central doté de radiateurs latéraux et d'une fine carrosserie en aluminium. Elégante et innovante, la Mustang ne sera jamais alignée en course, mais elle servira de point de départ à la réalisation du futur prototype. Celui-ci conservera, en effet, une longueur et un empattement identiques et surtout une hauteur de 40 pouces qui lui vaudra l'appellation GT 40. Toutefois, si la parenté est évidente, la genèse de la GT 40 sera bien plus chaotique et compliquée. Henry Ford a fixé l'échéance en 1964 et Iaccoca sait qu'il sera impossible à Ford qui ne possède aucune expérience en la matière, de tenir des délais aussi brefs. Réaliste ou opportuniste, mais surtout disposant des moyens de ses ambitions, Ford sait qu'il peut se payer ce qui ce fait de mieux en matière de sport automobile. Le rachat de Ferrari est envisagé pendant un temps, mais il semble bien aujourd'hui que le Commendatore a profité des circonstances et d'une certaine naïveté de ses interlocuteurs américains, pour faire monter les enchères avec le groupe Fiat. Outre l'humiliation, l'opération se conclut pour Ford par quelques précieux mois de perdus et en mai 1963, le projet est revenu à la case départ.
Il devient urgent de trouver une solution de rechange. Ford se tourne alors vers son antenne britannique très active dans les épreuves "Tourisme" et entretenant d'excellentes relations avec la plupart des constructeurs dont elle assure la motorisation des monoplaces. Lotus, Cooper et Lola sont contactés. Cette dernière ne possède pas la notoriété de ses aînées, mais elle vient de présenter une jolie berlinette à moteur... Ford. Le contrat est signé le 1er août 1963 et en échange d'une somme très confortable, Eric Broadley, l'ingénieur fondateur de la marque, s'engage à travailler exclusivement sur le projet Ford et surtout à ne pas y attacher... son nom. La Lola Mk 6 GT remarquée aux 24 Heures du Mans, reprend du service en septembre et entame une série d'essais intensifs à Monza, tandis qu'un second modèle est expédié chez Ford aux USA pour y être soigneusement étudié. Le recrutement des ingénieurs placés sous la direction technique Roy Lunn et des "hommes de terrain" dépendant de John Wyer, le directeur sportif bat son plein et s'apparente bientôt à une "dream team". Une vaste usine ultra moderne est construite dans un temps record à Slough dans la banlieue de Londres, mais en dépit de ces moyens exorbitants, le temps fait défaut et les équipes doivent travailler jour et nuit pour tenir les délais.
Dans ces conditions extrêmes, le lien de parenté entre la Lola et la Ford sera des plus étroit. Le châssis constitué de caissons en acier est très inspiré de celui de la Lola, tandis que la silhouette compacte de la carrosserie ne peut nier une forte ressemblance, avec notamment ces échancrures de portières sur le pavillon de toit pour faciliter l'accès à bord. Après bien des difficultés sur le plan aérodynamique, la ligne est arrêtée en février 1964 et l'habillage constitué d'éléments de tôle d'aluminium et de fibre de verre est confié à la société britannique "Specialisated mouldings".Comme sur la Lola, le V8-4.2 litres dérivé du bloc de la Fairlane est installé en position centrale arrière et relié à une boîte à quatre vitesses (non synchronisés) Colotti. Démodée et peu fonctionnelle, elle est la seule disponible sur le marché, capable d'absorber une telle puissance, mais faute de temps, Ford n'a pas d'autre choix. Le 14 mars 1964, le premier châssis fabriqué par la société Abbey Pannels de Coventry est livré à l'usine de Slough et l'assemblage final est réalisé en une quinzaine de jours, pour respecter la date de présentation fixée au 1er avril. Après un aller-retour pour un show organisé par le tout puissant service marketing de Ford, la première GT 40 prend le chemin du Mans pour les essais d'avril. Le baptême de la piste sera douloureux. Les premiers essais démentent toutes les données fournies par les précieux ordinateurs tant au niveau de l'aérodynamique que du freinage ou du refroidissement.
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Ford GT40, un mythe ressuscité avec brio
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