L’automobile, une affaire de genre ?
Un scientifique a constaté que, en distribuant des jouets dans l’enclos des bonobos d’un zoo, les jeunes femelles se sont emparées des poupées, et les petits mâles ont joué avec les camions. Faut-il en conclure que les voitures sont pour les garçons, pas pour les filles ? Pas si vite.
Les hommes ? Des champions. Les Filles ? « femmes au volant mort au tournant ». Ces vieux clichés ont vécu et l’on sait aujourd’hui qu’ils sont le fruit d’une éducation ou les petites filles jouent aux poupées et les garçons aux petites voitures. De même que l’on sait que le féminin se conjugue très bien avec la conduite d’une auto, que les femmes ont moins d’accidents que les hommes, qu’elles achètent, et ont besoin de leur auto, au moins autant que ces messieurs.
C’est donc rassuré et rempli de ces certitudes que l’on se précipite sur le long entretien que l’éthologue spécialiste des primates Frans de Waal a accordé à nos confrères du Monde. Quel rapport entre nos cousins les singes et le sujet qui nous anime ? Le néerlando-américain, sommité dans son domaine, s’est justement penché, dans Différents, son dernier ouvrage, sur le genre chez les primates.
Et que nous apprend l’éthologue au détour d’une question ? Que des expériences ont été menées dans certains zoos. Des poupées et de petits camions ont été disséminés dans l’enclos des bonobos et, fait incroyable, les petites femelles se sont emparées des poupées, alors que les jeunes mâles se sont intéressés aux jouets qui roulent.
En ce qui concerne l’attitude des petites bonobos, Frans de Waal a son idée, et elle est plutôt logique. « Durant leur vie, elles vont s’occuper des nourrissons et elles doivent acquérir ces compétences, c’est donc une façon pour elles d’apprendre à leur faire ». En revanche, pourquoi les jeunes mâles jouent-ils avec des camions ? « Je ne sais pas » avoue le scientifique. Alors il avance une hypothèse, qui émane de ses confrères, et qui indique que les mâles ont un niveau d’énergie plus élevé que les femelles et que ces jouets leur permettraient de la dépenser.
Dans la nature, les petites bonobos jouent avec des rondins de bois qui deviennent leurs poupées
Évidemment, cette expérience a eu lieu dans un zoo, et les jeunes bonobos n’ont pas accès à des autos miniatures ou à des poupées dans leur milieu naturel. En revanche de jeunes demoiselles singes à l’état sauvage ont été observées en train de ramasser des rondins de bois et des pierres. Elles leur ont construit des nids et les ont traités comme des nourrissons. Quant aux garçons bonobos, nul ne les a observés en train de faire rouler des cailloux.
Quelles conclusions tirer des travaux de Frans de Waal ? Il livre lui-même un début de réponse. « Certains pensent à supprimer les genres et à agir comme si les garçons et les filles étaient similaires. Pour moi, ce n’est pas la solution. Le problème de l’inégalité des genres n’est pas le genre, mais l’inégalité ». En clair, on peut être différent et accepter les différences. Et que les petites filles jouent indifféremment aux poupées ou aux petites autos, et que les garçons en fassent autant.
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