2. Essai - Honda Transalp 750 : voyage voyage ?
C’est en Algarve (Portugal), du côté de Tavira, que se tenait le lancement international de la Transalp 750 en ce début mars 2023. Un terrain de jeu hors normes pour une moto essentielle dans une gamme comptant déjà pas loin de 4 trails, avec les CRF 250 L, CB500 X et les deux Africa Twin 1100 (normale ou DCT et Adventure ou normale) sans compter l’hybride X-ADV. Ce chaînon manquant, véritable trait d’union entre la moyenne et la grosse cylindrée apporte-t-il ce qui manque aux amateurs de l’ancienne Transalp ? Est-il en mesure de combler les jeunes conducteurs et de conquérir les amateurs de motos d’aventure (fut-elle du quotidien) ? Nous avions 180 km et une boucle passant par Cachopo pour le découvrir.
La mise en route du moteur fait déjà résonner une sonorité profonde et puissante au travers d’un échappement pourtant discret de nature. Basses fréquences et mediums flattent durablement l’oreille. De nouvelles admissions d’air et un cheminement spécifique du flux, ainsi qu’un travail certains sur le « silencieux », ont permis d’obtenir une sonorité très trailisante et jamais excessive. Le bicylindre s’exprime clairement, tandis que les premiers tours de roues donnent le ton. Le guidon est bien placé et surtout pas trop large, favorisant les manœuvres à allure lente à modérée : la Tansalp tourne court.
Le cintre permet une prise en mains précise, y compris pour les envergures de bras les moins amples, et il offre un contrôle appréciable sur un train avant d’une neutralité bienvenue et d’une légèreté certaine. Par contre, on note quelques remontées de pulsations, autant induites par le moteur que par les pneumatiques : ça vibre juste ce qu’il faut pour ne pas pouvoir dire que la moto est aseptisée. De quoi rendre vivante, donc, une mécanique bien huilée au sens propre comme au sens figuré. Rappelons que l’embrayage anti-drible FCC profite de disques garnis de manière oblique favorisant le glissement et la lubrification. Au levier gauche, la pression à exercer est modérée, tandis que le couple est bien absorbé lors des rétrogradages, y compris ceux opérés au shifter sans couper les gaz.
Si l’on sent bien le grand diamètre de la roue avant, il n’influe jamais sur la précision de la direction, tandis que l’on entend davantage le bruit des pneumatiques remonter le long de la colonne de direction. Notamment aux alentours de 70 km/h. Un phénomène déjà connu sur les R 1250 GS, par exemple. Une vitesse que l’on atteint très aisément sur le premier rapport, qui pousse au-delà de 90. La seconde enchaîne avec 122 compteur au moment où intervient la rupture, tandis que la troisième emmène à plus de 160 km/h… Le 200 est presque envisageable en quatre… La santé est bien présente et impossible de sentir s’il existe un bridage volontaire des performances de la Translap faute d’autoroute allemande. De fait, ce moteur pousse sans faiblir, mais il ne calque pas du tout son comportement sur celui de la Hornet 750.
Plusieurs raisons à cela : l’admission d’air, nous l’avons dit, qui renforce les bas régimes et le couple, mais aussi un calibrage d’injection spécifique et une roue arrière de plus grande dimension, aux dires des ingénieurs Honda. Le carburant arrive toujours avec une pression de 450 kPA, soit une valeur très élevée au regard des autres modèles Honda, permettant une efficience de premier ordre et une consommation des plus mesurée, même en cas de soudage de poignée droite. Pour preuve les 5,2 l/100 km affichés par notre modèle d’essai après une boucle vallonnée au milieu des collines du district de Loulé. Honda annonce 4,4 l/100 km en cycle normé, ce qui peut être envisagé si l'on roule à l'économie/écologie.
Souple, le twin à 270° accepte de repartir doucement en 6 à partir de 60 km/h, tandis que l’on observe un moteur à deux étages. Sans ménagement, le bicylindre vertical de nouvelle génération met en avant un comportement doux sur les premiers rapports et même relativement serein entre 2 et 3 500 tr/min. Il commence à décoller à partir de 4 000/4 500 tr/min, avant de partir de plus belle jusqu’à mi-régimes où la puissance se calme avant de remonter subrepticement et de clamer sa puissance maximale. En cela, le bloc est bien moins démonstratif que celui de la Hornet 750, qui n’hésite pas à cabrer sur ses trois premiers rapports à la seule puissance. Ici, tout est canalisé, plus feutré sans être trop filtré, et la sensation comme l’équilibre de force et de progressivité apparaît logiquement plus important : le trail ne chahute pas qui le conduit. Molle, la Transalp ? Oh que non. Plus réactive et récréative une fois qu’on la travaille au corps, elle montre effectivement deux visages d’un point de vue mécanique, et permet d’envisager le off road de plusieurs manières.
Alors que nous voici dans un petit passage de chemins ocres alternant terre humide et socle rocheux, le mode User, programmé pour désactiver l’anti patinage et offrir la réponse maximale de l’accélérateur, se montre trop réactif, trop vif pour offrir de bonnes sensations. Ça tire sur les bras, une Transalp ?? Apparemment, oui. Revenu en position 2 sur 4 niveau réponse, tout rentre dans l’ordre et la moto se montre fort docile, ne rechignant pas à faire s’exprimer le moteur une fois dans les tours tout en offrant une aisance agréable.
La glisse est comme la réponse : plus douce. Les suspensions apparaissent bien calibrées pour l’exercice, tandis que l’on se cale aisément contre le réservoir rebondi aux flancs parés de grip pour les genoux. Quant au mode Gravel, il surprend en activant très régulièrement le contrôle de traction à la simple accélération, amenuisant les réactions moteur et privilégiant les évolutions sur le couple plutôt que sur la puissance. De quoi évoluer en toute quiétude si l’on ne cherche pas les sensations et si l’on s’en remet également au freinage, là aussi très prévenant : l'attaque des étriers à fixation axiale est à la fois douce et forte, largement suffisante fort bien accordée à un ABS de bonne facture. Malgré les grands débattements, on ne joue pas au cheval à bascule à la moindre accélération ni sur les gros freinages, qui font plonger en douceur la fourche. Les amateurs de trail sauront apprécier, sans que cela ne vire dans la caricature. Efficace.
Dans la « terre », du moins les chemins blancs ou pistes bien tassées, comme les appellent très justement certains, les Karoo Street montrent une part très agréable de leur personnalité, faisant oublier leurs pavés qui motricent volontiers sur un terrain certes tassé et peu glissant. Cette parenthèse enduro soft ne nous aura pas permis de tester réellement la course ni les réglages de suspension, mais la souplesse affichée offre un bon niveau de confort, peu de retour dans le guidon et quelques frottages de ligne d’échappement sur un modèle non pourvu du sabot aluminium optionnel (un très bel élément fort bien moulé et en trois parties).
Le retour sur route bitumée rappelle la présence de pneumatiques mixtes, tandis que le rythme accélère. Toujours docile, la partie cycle profite d’un poids contenu et de suspensions encore une fois bien tarées pour donner des sensations trailisantes d’enfoncement sans jamais nuire à la trajectoire imprimée ou au freinage. Du guidon comme du levier droit, la Transalp se corrige sans ambages et son agilité est certaine, une fois encore, matinée d’une stabilité réjouissante. Tout juste parvient-on à faire sporadiquement glissouiller l’arrière sur de fortes accélérations. Le contrôle de traction remplit son office, intervenant sur l’angle de manière particulièrement discrète. Il faut le désactiver pour s’en rendre compte.
Justement. Les pneumatiques apparaissent bavardes sur l’angle alors qu’elles caressent le revêtement aux graviers bien ancrés, mais produisant un relief. Les Metzeler tiennent, tout en remontant vibrations et fausse impression de grip limite. Il faut dire que les repose pieds, non pourvus de tétons protecteurs, comment à user leur bord sur le bitume abrasif. Seuls un crachin, suivi d’une pluie fine mais soutenue, parviennent à réduire le rythme. Pourtant, l’impression d’adhérence demeure, tandis que la motricité est conservée même en mode Sport. L’occasion de tester les variantes de réglages.
Le mode Road profite d’une réponse et d’une montée en régime plus linéaires, tandis que le mode Rain castre copieusement le moteur sans changer pour autant la puissance maximale et renforce logiquement l’intervention de l’anti-patinage. La journée de roulage touche à sa fin, alors que nous rejoignons la côte par l’autoroute nous ramenant à Tavira. Les bras, exposés et trempés, rappellent que leur position est parallèle à la route, tandis que les épaules subissent également les affres de l’eau, tout comme elles subissaient précédemment la pression raisonnable de l’air heureusement doux. Concrètement, le buste et la tête sont plutôt bien épargnés, tandis que seules quelques petites turbulences rappellent que la hauteur de bulle, non réglable, est bonne. Gros rouleurs et rouleurs tous temps, à votre porte-monnaie, il faudra opter pour des déflecteurs additionnels. Par contre, les jambes sont plutôt bien épargnées naturellement par la forme du carénage. On passe à la conclusion ?
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