D’entrée, il faut préciser un élément essentiel pour la bonne compréhension de ce qui va suivre. Quand on vous explique qu’une Morgan à un châssis en bois, cela ne signifie pas qu’elle ne tient pas la route mais simplement que le cadre qui sert à fixer la carrosserie et certains éléments de l’habitacle est effectivement confectionné en bois (durée de vie donnée pour 40 ans). Le châssis à proprement parler, celui qui assure l'essentiel de la rigidité de l’auto est en aluminium, tout comme la carrosserie. D’ailleurs, une fois sur la route, à aucun moment, vous n’avez la sensation d’être assis dans une carriole molle en pin des Landes et c’est plutôt la fermeté de l’ensemble qui vous marque le fessier.
Non pas que l’amortissement soit réalisé comme la structure rapportée dans un tronc de frêne mais le fait d’être assis sur l’essieu arrière vous place au plus près de la secousse créée par la saignée dans le bitume. L’auto n’ayant pas un débattement de Buggy du Dakar vu que sa destination n’est pas d’avaler les dunes mais des kilomètres de virages à vitesse respectable et dans une posture digne, elle se doit de conserver un minimum de fermeté. D’un autre côté, la saignée qui vous vibre jusque dans les côtes lorsque les roues arrière la chevauchent n’aura engendré qu’un tout petit cahot de la proue quand les roues avant, rejetée très loin de vous, l’ont passée. On pourrait inventer un nouveau ratio que l’on nommerait « répartition du soubresaut » et que j’estimerais de 80/20 entre l’arrière et l’avant. La position de conduite très reculée n’est finalement pas si déroutante. En fait, on voit plutôt bien tout ce qui se passe alentour (nous n’avons pas eu le temps de rouler capoté, je vous l’accorde) et on parvient assez vite à se faire au gabarit qui n’a rien d’effrayant. L’auto est en effet plus courte qu’une Renault Clio (4,01 m), il suffit donc d’imaginer conduire la citadine du Losange assis aux places arrière pour se faire une idée de l’impression ressentie dans la Morgan.
En fait, la Plus 8 est d’une facilité assez délicieuse. Une fois que le cerveau s’est habitué à la direction très directe qui va vous faire mettre le nez 5 m avant la corde au premier coup de volant, on se fait très vite à la conduite de cet engin qui génère chez les personnes croisées des pouces levés et des sourires. Le plus compliqué est finalement de décapoter l’auto sans rien oublier de la procédure à suivre (de tous les clips à défaire et plis à bien faire) et de parvenir à caler son fessier dans un baquet assez étrange qui, à mon avis, n’acceptera pas tous ceux qui se seront laissés aller sur les Churros au saindoux durant leur existence passée. Évidemment, la Plus 8 n’est guère pratique et ne respire pas la modularité mais une Lamborghini Gallardo ne l'est guère plus et ce qui compte, c'est qu'elle est tout à fait adaptée à un usage quotidien.
Nous disposions de la boîte automatique 6 rapports (vous pouvez choisir pour le même prix la boîte manuelle 6 rapports) qui facilite la vie en ville et contribue à rendre le caractère de l’auto encore plus onctueux en plus de la rendre plus performante sur le 0 à 100 km/h. Car ce V8 4,8 l est un torrent de crème au chocolat, une vague d’onctuosité qui n’incite pas à la brusquerie. Il y a tout d’abord ce bruit de chaloupe qui dès le démarrage vous électrise les esgourdes et vous étire les zygomatiques. La tonalité toujours grave, le régime moteur qui ne cherche pas à décrocher la lune (puissance maxi à 6 400 tr/mn et couple de 490 Nm à 3 400 tr/mn), non, vraiment aucun élément à charge ne pourra être versé au dossier pour expliquer une envie de jouer les malotrus derrière le volant. Quoique… contrairement au Porsche Cayman essayé les jours suivants, en mode manuel, le levier de vitesse s’actionne dans le bon sens – pousser pour rétrograder et tirer pour monter les rapports. C’est une incitation à appuyer ses freinages et à amplifier ses relances pour bénéficier du transfert de masse naturel mais comme la boîte n’a rien d’une double embrayage ultra rapide (cela reste très correct pour une automatique ceci dit), on en revient vite à une conduite rapide et coulée. Parfois, le couple disponible permet un petit déhanché à la réaccélération mais c’est finalement assez progressif et si c’est bien réalisé, on reste dans l’atmosphère onctueuse qui accompagne cet essai. Relativisons cette douceur en précisant que la fiche technique annonce tout de même un 0 à 100 km/h en 4.2 secondes (4.5 secondes avec la boîte manuelle) et que la vitesse maximale bridée à 250 km/h est très vite atteinte… même si la direction très directe ne vous fera pas tenir ce rythme très longtemps. Quant aux dégâts capillaires occasionnés par la balade en décapotable, ils restent très minimes car avec les vitres de portes en place et l'assise assez basse (et ma taille de basketteur cul de jatte), on est plutôt bien protégé des remous.
Ce court essai ne nous a pas laissés le temps de mesurer la consommation mais sachez que la Plus 8 est donnée pour 12,1 l/100 km, ce qui semble réaliste en usage normal mais pas foncièrement spectaculaire vu que le X5 deux fois plus lourd ne réclame que 13,5l. Mais je peux affirmer sans trop de risque de me tromper que la différence de consommation entre les 2 se fera essentiellement en utilisation « touffue », les chiffres d'homologation étant réalisés dans des conditions très particulières et assez peu représentatives d'une utilisation normale d'un V8 4,8l de 368 ch !
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