Laissez-moi m'introduire moi-même
S’insérer dans la FW300 nécessite d’y réfléchir avant de se lancer. Sans cela, on a vite fait de se retrouver les genoux au niveau des oreilles, le volant entre les jambes. En fait, la barre transversale au pied du baquet sert à se caler debout dans le cockpit avant de se laisser glisser jambes tendues, pieds en avant dans le fourreau face à vous. Classique pour un pilote de monoplace, plus difficile pour le balourd un peu gauche habitué aux SUV. Pour les plus curieux, répondons tout de suite : capote en place, évidemment, ça ne fonctionne pas. Ce type d’auto demande de la souplesse, c’est un fait. Une fois encapsulé, tout irait pour le mieux si le tunnel de transmission ne vous obligeait pas à lever le coude comme un conducteur de camion. Certes, ainsi posturé, vous combattez mieux l’absence de direction assistée dans les manœuvres à basse vitesse mais sur photo, ça peut faire sourire. Ça, c’est pour votre coude droit parce qu’en ce qui concerne celui de gauche, il est comme sur toutes les répliques de Lotus 7, à l’extérieur de l’habitacle. Là aussi répondons aux plus curieux : avec les portières en place, ça n’est plus possible. Heureusement, un évidement dans le bas de porte vous octroie 3 cm de bonus qui ne servent pas à grand-chose lorsque vous dépassez les 90km/h puisque l’air extérieur plaque avec force ce bout de plastique sur votre avant-bras. D’un côté le coude est levé, de l’autre, il est plaqué vers le bas … si une Westfield est une auto décalée, sa position de conduite aussi !
Autre surprise pour le non initié, la pédale de frein n’est pas soudée rigide, non, en fait il n’y a pas d’assistance et votre cuisse gauche devra s’adapter. Puisqu’on a les pieds sur le pédalier, c’est l’occasion de s’apercevoir que son ergonomie n’aidera pas à l'exécution parfaite du talon-pointe.
Soyons clairs, la vie en Westfield n’est pas rose tous les jours. Ce type d’auto est pour tout dire un cauchemar la plupart du temps. Lorsque certains vous disent qu’une fois dedans, on ne veut plus en descendre, c’est probablement parce qu’à la longue l’exercice est pénible. Les contorsions une fois, ça va, 3 fois ça passe mais au bout de 6 ou 7 fois, votre volonté vous abandonne et vous restez là où vous êtes bien, c'est-à-dire à l’intérieur ! Dans les manœuvres, l’absence de direction assistée vous colle des crampes dans les bras, sur route, les frottements de la porte vous épilent votre bras gauche, votre passager prend un coup de coude à chaque changement de rapport, toute discussion est impossible au-delà de 90km/h, dans les bouchons, vous entrez très rapidement en combustion des pieds à la tête, les passages au péage sont marrants la première fois seulement, vous priez à chaque dépassement de camion, que le gars là haut vous a bien vu, à la première goutte de pluie, vos fesses se compriment et vous maudissez l’absence d’électronique en même temps que vous cherchez en panique un pont sous lequel vous pourrez installer tranquillement votre capote qui n’a même pas la prétention d’être étanche, le volume du coffre fera fuir n’importe quelle copine un tant soit peu coquette (allez obliger une fille coquette à voyager avec une simple brosse à dent), la garde au sol ridicule fait qu’il est possible de frotter le protège carter dans une grosse compression ou de rester coincé sur un arrêt de portail, en fait, pour être franc, la plupart du temps vous allez vraiment maudire cette voiture. Pour 41.200 euros, la majorité des gens « normaux » préfèreront une BMW Z4, une Nissan 370Z ou n’importe quoi d’autre de plus … civilisé.
Basic Instinct
En Westfield, à moins d’en avoir contracté une avec votre assurance auto, ne cherchez pas les assistances car vous êtes seul maître à bord et vous paradez sans filet. Les capteurs, ce sont vos fesses, le calculateur, c’est votre tête et l’ESP, ce sont vos mains et vos pieds. Ici, pas de notice de 200 pages à déchiffrer, les neurones du pilote de Westfield sont concentrés sur les mouvements de ses membres et le résultat qu’ils provoquent sur l’auto ! Pour beaucoup, la comparaison avec une Caterham vient naturellement … sauf chez Westfield où l’on affirme que la FW300 est conçue pour la route. Il faut comprendre là que selon ses concepteurs, elle n’est pas destinée à aller sur circuit alors que naturellement, il suffit de la laisser faire, elle va vous y amener un jour ou l’autre. Selon l’importateur, ça n’est pas le cas de la majorité des acheteurs, j’en suis surpris. Reste qu’effectivement, après l’avoir amenée se dégourdir sur le Pole Mécanique d’Alès, on admet presque dépité qu’effectivement elle n’y est pas totalement à son aise.
Le 1.6l turbo se montre royal sur route grâce à son caractère schizophrène : plutôt coupleux, il permet de rouler tranquillement sur un filet de gaz et d’assurer une consommation d’oiseau, mais dès que vous devenez plus lourd du pied droit et que les 3000tr/mn sont atteints, il se déchaîne. L’aiguille du manomètre de turbo met une claque à sa butée et dans un souffle rageur, vous vous téléportez 2 ou 3 voitures devant vous. Ses performances la placent au niveau d’une BMW M5 E39 400ch ou d’une Ferrari F355, d’une BMW 335i ou d’un Cayman S (13s au 400mDA et 24.5s 1000mDA). Ces petits exercices de téléportation sont jouissifs, ça fait de l’effet à tout le monde (conducteur, passager et « dépassé ») mais la jauge de carburant s’emballe dans un mouvement inverse à celui de la pression turbo ! Nous sommes parvenus à ne faire que 170 km avec un plein d’un peu moins de 30l… même l’importateur n’avait jamais vu ça. On l’admet, nous n’avons pas été tendres avec le bout d'alu sous le pied droit et n’avons pas toujours roulé à 130 sur l’autoroute allemande voisine (v-max : 200 km/h). L’aérodynamique de ce type d’auto étant à peu près aussi poussée que celle d’un cuiseur vapeur, ceci explique probablement notre « performance ». Comme pour beaucoup de sportives, sa faible consommation théorique ne peut être que le résultat d’une conduite coulée et très sage.
Piste amère
Sachant que sur route, sans même qu’elle donne l’impression qu’on la pousse vraiment, les vitesses de passage en courbe laissent à peu près tout ce qui roule à quelques longueurs derrière, l’arrivée sur le circuit se fait avec le sourire. Ça ne dure pas, l’auto sous-vire salement, les Toyo R1 ne sont pas les plus efficaces et les 888 seront certainement plus adaptés pour le circuit. Retour au stand, quelques tours de molette sur les amortisseurs plus tard, c’est mieux et on peut enfin attaquer.
C’est alors le moteur entièrement « stock » qui devient irritant. En fait, en plus de l’effet turbo marqué qui fait que vous n’avez jamais vraiment la puissance au moment où vous pressez l’accélérateur, l’électronique du moteur fait en sorte qu’au lever de pied, le 4 cylindres pousse encore un bref instant. C’est la gestion des gaz imbrulés qui en est la cause mais sur circuit, c’est franchement difficile à gérer. Après avoir placé la FW300 sur les freins pour la faire se déhancher du postérieur, il est difficile d’obtenir la puissance au bon moment afin de ressortir proprement en légère glisse. Là, du coup, l’auto reprend son grip juste avant que la puissance n’arrive, ce qui n’est ni joli à voir (et à vivre), ni très efficace. Au bout de plusieurs tours, on apprend à anticiper et à profiter du châssis équilibré, on retrouve alors par moment le plaisir que l’on peut éprouver dans une Caterham par exemple. Mais tout ceci est de courte durée car étonnamment, notre FW300 n’acceptait pas d’effectuer plus de 4 tours sans se mettre dans le rouge. Après nous en être inquiétés auprès de l’importateur, il semble que le souci provienne de l’huile qui dans ces conditions extrêmes entre en cavitation (des bulles se forment et le moteur moins bien lubrifié, se met à chauffer). Le problème connu sur ces répliques de 7 n’était jusqu’ici pas pris en compte par les anglais qui, comme indiqué plus haut, estiment que leur auto n’est pas conçue pour le circuit ! Après notre passage et la demande de l’importateur à la maison mère, un joli courrier nous est parvenu annonçant que Westfield allait analyser le problème pour y apporter une solution. Selon l’importateur qui a longtemps travaillé avec Caterham, il faut simplement installer un système anti-cavitation qui pourrait par exemple faire partie d’un futur pack « Circuit ». À suivre.
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