Péages - Autoroutes : l'annonce des hausses tarifaires repoussée
Les hausses des tarifs autoroutiers, prévues pour être particulièrement fortes en 2019, devaient être annoncées la semaine prochaine. Annonce a priori annulée, fait savoir 40 millions d'automobilistes, signe, selon elle, que le gouvernement pourrait réfléchir à un nouveau gel des prix, comme en 2015. Espérons que l'association se trompe. Car le précédent blocage coûte déjà très cher aux usagers ! Explications…
On devait être fixé le 11 décembre, date à laquelle les augmentations prévues aux péages autoroutiers en 2019 devaient être présentées au Comité des usagers du réseau routier national. Habituellement, cette consultation se tient en novembre, mais elle avait déjà été repoussée. Et voilà que l'association 40 millions d'automobilistes, qui fait partie de ce Comité, annonce, ce vendredi, que cette réunion a carrément "été annulée".
Pour l'association, face à la mobilisation des gilets jaunes, "cette annulation pourrait traduire un gel des tarifs autoroutiers au 1er février prochain, alors qu'une hausse exceptionnelle du prix des péages avait été programmée pour l'année 2019, suite à la signature l'an dernier d'un Plan de relance autoroutier imposant de nouveaux investissements aux sociétés". Toujours selon elle, ce gel serait alors "une victoire pour les automobilistes, dont le pouvoir d'achat ne cesse de baisser d'année en année"… Ce qui est pourtant loin d'être aussi évident qu'il n'en paraît !
Comme Caradisiac a déjà pu s'en expliquer, l'annonce d'un nouveau gel des tarifs, comme en 2015 sous le gouvernement de Manuel Valls, pourrait être au contraire la pire nouvelle qui puisse être faite aux usagers ! Car si les hausses des péages en 2019, et plus généralement des années à venir, sont aussi fortes, c'est aussi parce qu'un rattrapage a dû être consenti aux sept sociétés concessionnaires d'autoroutes (SCA) dites historiques, impactées par ce premier blocage des tarifs il y a près de quatre ans.
Le gel de 2015 a coûté un demi-milliard d'euros aux usagers !
Aussi injuste que cela puisse paraître en effet, le pouvoir en place à l'époque a agi en toute illégalité. Et pour éviter des actions en justice, il a dû tout simplement se résoudre à accepter de régler des sortes d'indemnités… Des "dommages-intérêts" de fait facturés aux usagers, via des hausses tarifaires encore plus élevées aux barrières autoroutières !
C'est l'Arafer, l'autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, qui a révélé le pot aux roses en 2016. Selon ses calculs, ces hausses supplémentaires, qui doivent justement s'appliquer à partir de 2019, et jusqu'en 2023, varient alors "de 0,23 % à 0,82 %, selon les concessionnaires", ces SCA que sont ASF, Cofiroute, Escota du groupe Vinci, APRR et AREA du groupe Eiffage, puis Sanef et SAPN du groupe Abertis. Ultime précision de l'Arafer , dans ce même rapport : si les hypothèses officielles de trafic et d'inflation se confirment, c'est quelque "500 millions d'euros de péages supplémentaires sur la durée restante des concessions (environ 20 ans)" que ces sociétés vont se récupérer en sus de ce qui était initialement prévu ! De quoi considérer ce gel de 2015 comme fortement préjudiciable aux usagers et proprement scandaleux…
Un nouveau plan d'investissements suspect
Aux augmentations (in)dues à ce gel de 2015, doit s'ajouter en 2019 une autre hausse très discutable, indépendante de l'inflation. Car pour rappel, en vertu des contrats bétons que l'État a consenti à leur signer lors de leur privatisation en 2002, 2004 et 2005, ces SCA peuvent relever leurs prix à hauteur de 70 % de l'inflation, chaque année. Pas de bol, l'inflation étant repartie à la hausse, les hausses des tarifs le sont d'autant aussi.
Mais en plus des répercussions de cette inflation, ce qui est surtout prévu, c'est l'augmentation qui résulte, comme l'évoque 40 millions d'automobilistes dans sa communication, du nouveau plan d’investissement de 700 millions d’euros décidé sous François Hollande, et validé par le Conseil d’État l'été dernier. Et les hausses pour les usagers sont alors estimées à une fourchette allant de 0,1 à 0,4 % durant les trois prochaines années.
Gros problème : l'adoption de ce nouveau plan est très discutable. Dans un rapport de 2017, voilà ce qu'en disait l'Arafer : “Les augmentations des tarifs de péages prévues excèdent le juste niveau qu’il serait légitime de faire supporter aux usagers”. Surtout, il apparaît, toujours selon l'Arafer, que certains projets correspondent “à des obligations déjà prévues dans les contrats” ou qu’il “n’était pas établi qu’ils soient strictement nécessaires ou utiles à l’exploitation de l’autoroute”.
Le report des annonces sur les hausses aux péages est peut-être le signe tant attendu que le gouvernement actuel a pris enfin la mesure des critiques soulevées il y a plus d'un an par l'Arafer ! Songerait-il alors à renégocier ce plan afin, non pas d'annoncer un nouveau gel catastrophique, mais des hausses moins fortes qu'initialement prévues ? On peut toujours l'espérer…
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