L’Europe vers un green deal de moins en moins green et de moins en moins clair
L’INFO DU JOUR – Révélé le 26 janvier, le nouveau plan de l’Union pour le verdissement semble se transformer en plan pour l’industrie, ce qui fait le malheur des mouvements écologistes. Fait-il pour autant le bonheur des constructeurs automobile ? Rien n'est certain, car à la tête de la Commission, on tergiverse, on se contredit et on entretient un flou pas très artistique.
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Ursula von der Leyen est une équilibriste. Du moins, c’est l’exercice que tente la présidente de la Commission européenne. Dans un texte publié à Bruxelles le 26 février, elle tente de ménager la chèvre écologique et le chou industriel. Le green deal voulu par Bruxelles en 2021 et destiné à décarboner le vieux continent est remanié. Il n’est pas mort, mais il n’est pas dans une forme resplendissante. Surtout, il est rebaptisé. Aujourd’hui, place au clean industrial deal.
Au programme : 100 milliards sont posés sur la table pour dynamiser l’industrie propre. Vraiment propre ? Les ONG écologistes à Bruxelles rouspètent, car les contreparties, plutôt logiques pour bénéficier de ces aides, sont inexistantes dans le texte. Mieux : l’objectif de décarbonation de 90% fixé à 2040 est passé à la trappe. Une disparition à laquelle Bruxelles a répondu en expliquant que le texte sera amendé au printemps. L’objectif principal de l’opération ne serait donc plus qu’un simple amendement oublié.
Le "en même temps" écolo-industriel
Évidemment, le texte de Bruxelles est une forme de réponse à la situation internationale, à sa dérégulation, et aux coups de butoir américains constatés depuis l’élection de Donald Trump qui tournent le dos à tous les objectifs C02, à tous les pactes verts et aux accords de Paris et d'attaquer l'Europe de front. Regagner en compétitivité et ne pas se laisser distancier est désormais le mantra d’Ursula von der Leyen. Et l’automobile dans tout ça ? La présidente y pense, mais d’une manière assez schizophrène, maniant savamment le « en même temps ».

Car elle ne démord pas de l’objectif zéro thermique pour 2035, tout en voulant maintenir la filière sur ses quatre pneus, et, dans le même temps, s’arc-boute sur les normes CAFE pour cette année et ne les remets pas en cause. Peut-être un rôle de bad cop compensé par son vice président français : Stéphane Séjourné. Serait-il le good cop de Bruxelles ? En tout cas, dans une interview qu’il a livré au Monde le jour même de la publication du rapport sur le clean industrial deal, l’ancien ministre des affaires étrangères semblait en mission spéciale avec l’objectif de câliner les constructeurs automobiles.
Good cop Séjourné, bad cop von der Leyen
Les normes CAFE et les milliards d’amendes qui pourraient découler de leur non-respect ? Séjourné souhaite qu’on « puisse purger ce point » et promet une réponse, dès le 5 mars, dès la semaine prochaine donc.
En ce qui concerne l’échéance de 2035, le vice-président va là encore à l’inverse de sa présidente qui souhaite maintenir la décision. Il sait que la clause de revoyure n’est que dans un an, mais souhaite ouvrir la discussion dès maintenant, n’hésitant pas à, le cas échéant, à "reconvoquer le Parlement pour lui soumettre à nouveau le texte". Une réflexion menée alors que les ventes de voitures électriques sont en hausse dans l'Union
Reste que les deux directions différentes prises au sommet de l’Union ne vont pas dans le sens réclamé jadis par Carlos Tavares et relayé par Luca de Meo, patron de Renault lorsqu’il était président de l’ACEA, le syndicat des constructeurs européens.
Ce que souhaitent les industriels, c’est de la clarté et une feuille de route législative sur plusieurs années, car le temps de l’industrie n’est pas toujours celui des politiques. Et entre le green deal transformé en clean industrial deal tout en se réclamant de la décarbonation et les contradictions entre les dirigeants de l’Union, la clarté n’est pas vraiment de mise à Bruxelles.
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