2. Essai BMW HP2 MegaMoto - Essai sur route

Je vous laisse imaginer un grand machin de 2m03 sur cette BMW qui semble avoir été conçue par un basketteur. Pour une fois, c'est au tour de Cédric de donner l'impression d'être au guidon d'un pocket-bike sur sa Ducat' Sport Classic. Enfin, on échange les rôles ! On dirait presque qu'il pourrait me passer entre les roues tellement il fait petit, depuis ma tour de contrôle. Je ne me manque de me payer sa tête au feu rouge. Et j'en rajoute : dos bien droit et menton haut, petit doigt relevé comme si l'accélérateur était une tasse à café chez Nadine de Rothschild. Je me pavane sur le Cours Lieutaud et l'effet est immédiat : les badauds sont interloqués. Gros sourire sous le casque.

Surtout qu'en ville, l'HP2 est plutôt à l'aise. Le moteur ronronne gentiment, à condition de ne pas descendre trop en sous-régime. Le bruit de l'Akrapovic d'origine (oops, apu chicanes) est envoutant. La machine se faufile sans mal, grâce à son train avant vif et son poids plume pour un tel gabarit. Les commandes sont souples, le freinage aussi, couplé à une selle antidérapante terriblement efficace. Le tout donne un autre visage aux portions entre deux feux rouges. Mais bon, on va pas claquer 18 000 euros pour du trajet urbain, ça serait gâché. Surtout que le flat twin de la HP2 est tellement haut et large qu'il touche les rétroviseurs des voitures quand on remonte les files (mais non, oh, j'déconne… par contre, il vous explose les tibias à chaque arrêt de la moto quand on n'y fait pas attention, ça c'est du vécu !).

On s'extirpe de la ville phocéenne pour gagner le col de la Gineste, afin de tester l'étalon sur le terrain pour lequel il a été conçu. Difficile de dire ce qui en est la cause, mais la HP2 n'est pas vraiment une moto intuitive. Elle est vive mais il faut prendre le coup pour la caler sur la bonne trajectoire, certainement du fait de sa hauteur. D'ailleurs, ça n'a pas échappé aux deux rascals qui m'accompagnent et qui ne manquent pas l'occasion de me coller un boulevard. Difficile de se résigner à être à la traîne sur un engin pareil, alors dès que le mode d'emploi est assimilé, on visse la poignée de droite, et…

Et pas grand-chose. Par HP"2", comprenez "Flat Twin". Pour un bicylindre de 1200 cc, logé au beau milieu d'une panoplie complète d'équipements de compétition, il me semble que l'on serait en droit d'attendre une poussée un peu plus velue. Le moteur est rempli, certes. Il reprend assez bas dans les tours, certes. Mais c'est aseptisé, ça monte gentiment et linéairement. C'est sage. Trop sage ! Autant la Moto Morini Corsaro (aussi un twin de 1200 cc) vous calait les yeux au fond du casque et envoyait la roue avant au ciel dès qu'on effleurait les gaz ; autant l'HP2 se montre rassurante et à l'abri de toute excès d'hystérie de la roue arrière. Il est vrai que l'efficacité de nait pas dans la brutalité du moteur, mais sur ce type de moto, les aspects sauvages et anticonformistes participent grandement au fun qu'elle procure. Il était sûrement naïf d'attendre ça d'une BMW… Je crois que je ne suis tout simplement pas fait pour le flat-twin, ou l'inverse.

Mais avant de blâmer, il ne faut pas oublier que le bicylindre qui ronronne ici est bridé par notre cher particularisme français. Au final, on se retrouve avec un moteur qui ne donne pas grand-chose jusqu'à 4500 tr/min, régime où il commence à se réveiller, voire même à grogner, pour être monstrueusement bâillonné à 6500 tr/min. La plage d'utilisation est mince ! Si le moulin poussait non-stop jusqu'à 8000 tr/min, comme dans n'importe quel autre pays du monde, je veux bien croire que les sensations seraient différentes. Alors on est frustré : un petit goût amer reste au fond de la gorge. Et on se venge en malmenant la belle BMW dans les enchaînements rapides. On la lance à droite et puis à gauche, comme si on était convaincu qu'en la bousculant, elle finirait par se réveiller.

Force est de constater que la partie cycle est tout simplement extraordinaire. La stabilité de la HP2 est impossible à mettre en défaut. Une fois qu'on a pris le coup, elle se cale dans la trajectoire et n'en bouge pas d'un pouce. Rigide et sereine, accompagnée d'un freinage qui n'a pas un mordant époustouflant mais un feeling délicieux et parfaitement efficace. Il faut reconnaître que plus on tape dedans, plus elle se montre à la hauteur. Elle semble même en redemander, en se prêtant à tous les styles de conduite : pied sorti ou genou au sol (quel est l'idiot qui s'est levé la tête dans le pâté et qui a oublié de mettre ses sliders sur son futal ? Gagné !). Histoire de rendre l'essai un peu plus folklorique, le vent s'est invité à la fête. Un mistral à décorner les marins des femmes infidèles (petit clin d'œil à Jacques, 30 ans déjà). Et malgré les bourrasques (quasiment impossible de garder la moto sur la béquille lors des photos statiques), malgré la prise au vent du couple pilote/machine (c'est pas peu dire !!!), la HP2 n'est pas devenue inquiétante pour autant. La qualité des équipements n'y est pas étrangère.

La BMW HP2 baigne dans l'excès sur de nombreux points, que ce soit dans son look, la liste de ses équipements, son charisme, qui n'a d'égal que son tarif. Il semblait logique que le moteur suive sur cet élan d'exception. Or sur le sol français, le moteur se montre efficace mais malheureusement un peu trop sage. Un bémol qui se ferait vite oublier par les excellentes aptitudes sportives de la moto, si son prix ne justifiait pas un si haut niveau d'exigences. Il en résulte donc une machine réservée à quelques passionnés au compte en banque garni, s'offrant un jouet de luxe pour assouvir des plaisirs égoïstes, sans trop prendre de risque de wheeling lors du maniement des gaz…

Merci à Nico -Meme pas froid- Muller pour les photos dignes d'un pro ! A Katoche et la limande pour le soutien :)

Et surtout, grand merci à la concession EUROPE MOTO où vous pourrez retrouver la HP2 à l'essai :

EUROPE MOTO

140 Cours Lieutaud

13001 MARSEILLE

Tél : 04.91.48.52.65