Czinger 21C : la voiture du futur peut faire encore rêver
À défaut de Salon de Genève 2020, c'est hier à Londres que la toute jeune marque californienne Czinger a présenté pour la première fois sur le continent européen sa 21C. Encore une hypercar avec une puissance à quatre chiffres, vous dites-vous ? Comme la Koenigsegg Gemera, celle-là n'est pas comme les autres.
Certains petits artisans automobiles à la diffusion confidentielle font parfois bien mieux que des groupes mondiaux aux moyens infinis. Prenez par exemple le suédois Koenigsegg dont la Gemera, sa dernière création hybride rechargeable, est tellement affutée qu'elle fait passer la Bugatti Chiron et son W16 8.0 de 1 500 ch pour un silex vaguement taillé attaché maladroitement sur un bout de bois vermoulu. Avez-vous déjà vu une fiche technique comprenant un 3 cylindres 2.0 biturbo (ce qui est déjà en soi une curiosité mécanique s'expliquant par le fait qu'il y a deux sorties d'échappement par cylindres, une par soupape donc) de seulement 70 kg, aux soupapes actionnées par des vérins pneumatiques et non des arbres à came ? Non. Développant 600 ch et 600 Nm (soit 300 ch/l et Nm/l mais aussi 200 ch et Nm par cylindre !), cette petite usine tournant au bioéthanol et ne pesant que 70 kg est de plus associé à un trio de moteurs électriques, l'ensemble offrant un total de 1 700 ch et 3 498 Nm ? Non.
Est-ce que cette incroyable recette inédite donne un résultat fiable ? Aucune importance, elle a le mérite de faire rêver d'un futur automobile passionnant et c'est déjà beaucoup. Les performances annoncées sont bien évidemment surréalistes : 0 à 100 km/h en 1,9 s, 400 km/h en pointe et, accessoirement, 50 km d'autonomie en électrique grâce à sa petite batterie Ni-MH de 16,6 kWh.
Mais ce n'est pas la seule création furieusement originale qui aurait dû être dévoilée au Salon de Genève 2020. Plus obscur encore, que ce soit par sa notoriété naissante ou la prononciation de son nom, Czinger avait comme objectif de franchir pour la première fois l'Atlantique pour présenter la 21C au rendez-vous automobile helvète qui n'a jamais eu lieu pour la raison que vous connaissez déjà. Mais c'est finalement à Londres que l'événement a eu lieu hier. Et cette voiture se montre déjà fascinante. Son développement a donné lieu aux dépôts de plus de 350 brevets et a coûté entre 150 et 200 millions de dollars.
Mais attention, cet argent ne provient pas d'avances réclamées en amont mais du portefeuille même du patron de la marque, Kevin Czinger, aidé par quelques amis investisseurs. Pas de maquette à l'échelle 1 ni de performances qui tiennent plus du vœu pieux, vous avez ici le modèle final qui réalise déjà tout ce qui est écrit sur l'étiquette. Comme le dit Jens Sverdrup, responsable commercial de son état : « la plupart du temps, les marques de supercars n'ont strictement rien, elles montrent une coquille vide et on peut en faire de très belles pour un million d'euros. On remet la même somme et on peut avoir un chouette stand à Genève. Ensuite, elles ouvrent les commandes et les avances des clients servent au développement de la voiture avec comme objectif de tenter de respecter les promesses initiales. Nous avons fait l'inverse. La voiture existe déjà exactement comme nous la présentons et l'avance sert à la produire et non à la développer ».
Et en regardant ses spécificités, on comprend aisément où cet argent est passé. Pour commencer, cette 21C, qui peut accueillir deux occupants l'un derrière l'autre à la façon d'un... Renault Twizy, fourmille de composants imprimés en 3D, comme les triangles et les montants de suspension, ce qui permet d'utiliser le minimum de matière pour atteindre le maximum de résistance. Ajoutez ces éléments à un châssis mélangeant aluminium et fibre de carbone et la masse finale est de 1 250 kg. C'est non seulement 750 kg de moins que le pachyderme qu'est la Bugatti Chiron, notre référence du jour mais cela permet d'obtenir l'exceptionnel rapport poids/puissance de 1. Ce qui nous amène à la mécanique. Accrochez-vous.
Comme Koenigsegg, Czinger a bien compris l'intérêt du downsizing mais emprunte un chemin légèrement différent : pas de 3 cylindres ici mais un V8 de 2.88 ne pesant que 120 kg et développé entièrement en interne. Gavé au bio-méthanol par une paire de turbos et accolé à une boîte de vitesses séquentielle maison à sept rapports en position transaxle, il génère 950 ch aux roues arrière au régime stratosphérique de 10 500 tr/min (avec une zone rouge à 11 000 tr/min), ce qui en fait selon Czinger le moteur thermique avec la plus grande puissance au litre au monde. « Les calculs ne sont pas bons, Kevin » me direz-vous et c'est vrai qu'il manque encore quelques équidés pour égaler le chiffre de la masse et la cavalerie supplémentaire est fournie par un moteur électrique de 150 ch pour chaque roues avant. 950 + 150 + 150 = 1 250, le compte est bon. Sans surprise, la 21C égale la Gemera sur l'exercice du 0 à 100 km/h, soit une demi-seconde de moins que notre bouc émission alsacien, franchit la barre des 300 km/h en 15 s puis des 400 km/h en 29 s et n'arrêterait d'accélérer qu'une fois la vitesse de 432 km/h atteinte.
Fait rare dans le monde de l'hypercar, moteur et boîte ont été entièrement développés en interne.
Avec de tels chiffres, la Czinger 21C a bien évidemment passé beaucoup de temps en soufflerie pour garantir sa stabilité et existera en deux versions : une de route générant 250 kg d'appui à 250 km/h et une autre plus orientée circuit qui sacrifiera un peu de la vitesse maximum (380 km/h) en échange de 750 kg d'appui. Et elle sera plus légère de 32 kg, ce qui ne gâche rien.
80 exemplaires hautement personnalisables seront produits pour un prix allant de 2,5 à 3,5 millions de dollars, soit entre 2,2 et 3,1 millions d'euros.
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