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Chine : plongée au cœur du nouveau nombril de la planète automobile

Dans Economie / Politique / Industrie

Michel Holtz

L’INFO DU JOUR - Au moment ou Donald Trump et Xi Jinping passent un accord concernant les taxes douanières, ou en est la Chine de l’automobile ? Reportage à Shanghai et Wuhu, au cœur de la machine qui s’apprête à débarquer en France dès le début 2026 : le groupe Chery.

Chine : plongée au cœur du nouveau nombril de la planète automobile
Robot-taxi ou futur modèle électrique ? Un concept-car conçu par le groupe Chery. Crédit photo : Caradisiac.

Ce n’est pas un silence complet. C’est un bruit sourd, atténué, et plutôt paisible qui règne dans les immenses rues de Shanghai. En cause, les fameuses plaques vertes, celles que le gouvernement accorde aux voitures électriques, devenues omniprésentes, dans les grandes villes chinoises du moins. Et elles représentent désormais le plus fort bataillon dans le quartier d’affaires de Pudong. Bien sûr, les scooters sont eux aussi omniprésents, comme dans tous les pays d’Asie, mais eux aussi sont électriques, dans près de 100 % des cas.

Cette plaque verte collée sur les autos est la meilleure clé d’accès aux parkings souterrains, moins chers grâce à ce talisman, et dont toutes les places sont équipées de bornes de recharge, elles sont déjà 17 millions dans le pays. Un stationnement enfoui obligatoire au centre de la mégalopole de 24 millions d’habitants, ou il est désormais interdit de s’arrêter en surface. On n’y trouve d’ailleurs aucune place prévue à cet usage. Le rêve d’Anne Hidalgo s’est réalisé, à 11 300 km de Paris.

Quelques vieilles Japonaises et des Peugeot 308 de première génération

Dans ce monde étrange, ou les rues sont des autoroutes à 8 voies, surplombées par quelques-uns des plus hauts gratte-ciel de la planète, les autos sont très majoritairement chinoises. De-ci de-là, on croise tout de même quelques Japonaises hors d’âge, et même des Peugeot 308 de toute première génération, trace d’une présence préhistorique du Lion. Mais quid des premium allemands pour qui la Chine était le terrain de jeu favori ?

Perdu au milieu des gratte-ciel parmi les plus hauts au monde. Crédit photo : Caradisiac.
Perdu au milieu des gratte-ciel parmi les plus hauts au monde. Crédit photo : Caradisiac.

Ce cadre de l’automobile chinoise, qui demande l’anonymat, dans un pays ou la parole est contrôlée, témoigne. « Ici, à l’inverse de l’Europe, les clients du premium sont plutôt jeunes. Ils ont autour de la quarantaine. Ils ont réussi, roulent en électrique et préfèrent les autos d’ici, plus tech. Les européennes sont ringardes à leurs yeux, et sont destinées à des sexagénaires qui roulent encore en thermique. Et ces derniers sont de moins en moins nombreux ». Ces jeunes roulent en Byd, Xpeng, Xiaomi, Lio Auto ou Nio et, pour quelques-uns d’entre eux, en Tesla, assemblées ici, à Shanghai.

À Shanghai, même les scooters sont électriques. Crédit photo Caradisiac.
À Shanghai, même les scooters sont électriques. Crédit photo Caradisiac.

Mais si la mégalopole est le poumon financier de l’empire, l’industrie, à l’exception de Saic (MG) et Tesla, est ailleurs. Les usines se situent à Wuhan (Dongfeng) ou Guangzhou (Faw). Mais pourquoi cet éloignement du centre névralgique ? Car les salaires chinois ne sont pas tous équivalents. Et si à Shanghai ils atteignent l’équivalent de 1 000 euros par mois pour un ouvrier, ils sont souvent inférieurs de 300 euros dans les villes de province. Comme à Wuhu ou le groupe Chery assemble ses multiples marques. Ce sont justement deux d’entre elles (Jaecoo et Omoda) qui vont être distribuées en France dès l’an prochain.

Mais pourquoi ce constructeur, appartenant à 100 % au gouvernement de Pékin, s’est-il installé, dès sa fondation, en 1997, dans l’une des régions les plus enclavées de Chine ? Outre les salaires, loin de ceux de Shanghai, Wuhu, une ville de 3 millions d’habitants tout de même, est posée au bord du fleuve Yang Tse et dispose d’un port en eau profonde, ou les « cars boats » géants peuvent accoster et repartir vers le monde entier.

Une autoroute de banlieue ? Une rue de grande ville chinoise plutôt. Crédit photo : Caradisiac.
Une autoroute de banlieue ? Une rue de grande ville chinoise plutôt. Crédit photo : Caradisiac.

Une situation idéale pour une entreprise conçue pour exporter ses 8 marques (Icar, Exceed, Luxceed, Lespas, Chery, Jaecoo, Omoda et Jetour) développées, fabriquées, assemblées et transportées par près de 200 000 salariés qui travaillent pour le constructeur et ses équipementiers et prestataires sur place.

Pour se rendre à Wuhu, c’est très simple : il suffit d’emprunter le Fuxing Hao, le « Train du renouveau », clone de notre TGV. Et pour y grimper, après s’acquitter du prix du billet, il suffit de se présenter devant le portillon avant l’accès au quai. La reconnaissance faciale opère et les portes s’ouvrent. Au pire, on peut toujours canner son passeport.

Liberté surveillée

La SNCF locale, mais aussi la RATP version Shanghai, et toutes les instances du pays connaissent dans le moindre détail tous les agissements, et tous les déplacements de tous les citoyens chinois, et des étrangers se trouvant sur leur sol. Fascinant et effrayant.

Deux heures et 360 km plus tard, terminus Wuhu, la motorcity de la province de l’Anhui. Après le TGV, le taxi et l’hôtel, la trilogie du voyageur se poursuit. Mais ça coince. Ici comme ailleurs en Chine, les immeubles et les rues poussent tellement vite que Baidu, le Waze local, n’a pas toujours le temps de se mettre à jour.

C’est ainsi que Waho le taximan se démène entre les chantiers et les chaussées inachevées pour atteindre son but. Il roule dans une Byd électrique âgée de quelques années déjà et, lorsqu’on lui explique, grâce au traducteur du smartphone, que des chauffeurs de taxi européens sont encore nombreux au volant de voitures thermiques, voir de Mercedes, il s’étonne, « pas tous les jours quand même ? » comme si c’étaient des pièces de musée, des autos de collection.

Nos autos de collection du Vieux Continent sont-elles menacées par ces voitures fabriquées, entre autres, à Wuhu, ou le groupe Chery affirme être capable d’assembler une voiture à la minute ? Dans cette usine du constructeur en tout cas, cadence ne rime pas avec agitation. Les robots travaillent dans un silence de cathédrale seulement troublé par quelques humains qui viennent de temps à autre les régler, ou les motiver.

Pour le président du groupe Chery, l’avenir n’est pas seulement automobile. Crédit photo : Caradisiac.
Pour le président du groupe Chery, l’avenir n’est pas seulement automobile. Crédit photo : Caradisiac.

Le groupe est ainsi devenu, en cadence et en silence, le premier exportateur chinois de voitures. Cette dimension internationale (le constructeur est présent dans 110 pays) n’est pas seulement le fait de Chery évidemment. Toutes les 123 marques de l’empire du Milieu sont à l’offensive dans ce domaine.

Une offensive que l’on peut même dater assez précisément. Ou du moins a-t-elle été formalisée en 2016 dans un document publié par le plan directeur du Conseil d’État chinois et disséquée par Yuzhen Xie de la Renmin University of China. Selon la chercheuse, ce rapport prévoit la marche à suivre et donne les directives aux industriels, et, pour l’automobile, il décrit trois phases : « suivre », « rattraper » et « mener ».

La première stratégie a été suivie depuis 1953, date de la première auto fabriquée en Chine à l’an 2 000. Une phase où l’on suit tant bien que mal ce qui se fait ailleurs.

À partir de 2 001, date de l’entrée du pays dans l’OMC, et jusqu’en 2019, la seconde partie du plan est mise en place Il s’agit alors d’attirer les constructeurs étrangers et de s’en inspirer, notamment au travers de coentreprises. L’effet de cette deuxième phase s’est fait sentir dès 2009, l’année ou la Chine est devenue le premier producteur de voitures au monde.

Madame le robot Chery est capable de dévoiler et de présenter une auto sans l’aide de personne. Crédit photo : ca
Madame le robot Chery est capable de dévoiler et de présenter une auto sans l’aide de personne. Crédit photo : ca

La phase suivante, c’est celle qui a été mise en place dès 2019. Elle est toujours en vigueur aujourd’hui et consiste à mener, comme l’a demandé explicitement le Conseil d’État. Au programme : le « dépassement en changeant de voie » comme l’explique le document. Cette autre voie, c’est l’électrification, de l’hybridation simple au PHEV, en passant par le prolongateur d’autonomie et le 100 % électrique. Une phase qui passe par la fabrication en Chine, et par une implication dans les régions, comme l’Europe, ou l’assemblage local est un atout pour bénéficier des aides toutes aussi locales.

Des robots et des taxis volants

Mais l’automobile n’est peut-être plus une finalité pour l’industrie chinoise, dont le changement de voie est possiblement, un changement de destination. Ainsi, Yin Tongyue, le président de Chery est formel. « Dans 10 ans, l’automobile ne représentera plus que 10 % de nos activités ». Le reste ? « Les robots-taxis, volants ou terrestres, et les robots, domestiques et professionnels ».

En écoutant le patron du groupe, en consultant cette étude, et en s’approchant au plus près du modèle chinois, on en vient à se demander si Carlos Tavares, dans ses dernières déclarations, ne se la joue pas un peu trop optimiste. Car l’ex-boss de Stellantis prévoit une part de marché de 10 % pour les marques chinoises en Europe dans les prochaines années. Il pourrait être en deçà de la réalité, et pas seulement dans l’automobile.

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