Albert Uderzo : disparition de l’irréductible dessinateur et passionné de Ferrari
Lui et ses personnages ont marqué nos vies depuis des décennies. La vie des Français en général, et celui des passionnés d’automobile en particulier. Car passionné de voitures, Uderzo l’était aussi. Au point d’être un collectionneur pointu, et un dessinateur facétieux qui parvenait à truffer les aventures d’Astérix et Obélix de références à ses chères bagnoles. Hommage.
Le village d’irréductibles le pensait éternel. Mais une crise cardiaque a emporté Albert Uderzo ce mardi 24 mars. Et ce n’est pas seulement un homme de 92 ans qui s’en est allé, mais le cobaptiseur et gardien d’un drôle de pays qu’il a façonné pendant 50 ans avec son complice René Goscinny. Un pays habité par de grands gosses braillards, désinvoltes et râleurs au grand cœur, de « Gaulois réfractaires » comme les a définis Emmanuel Macron. Une appellation qui lui a valu, ainsi qu'il se doit, une volée de bois vert, comme un hommage aux bagarres de la place du village armoricain confiné, et entouré de camps romains.
Uderzo nous avait cernés, jusque dans nos passions qui étaient aussi les siennes, notamment en matière d’automobile. Le règne d’Astérix a coïncidé avec celui de la généralisation de la bagnole dans notre pays (le premier album date de 1959) et à l’âge d’or du premier, a correspondu celui de la seconde.Et comme ses auteurs racontait la Gaule au plus près de la France moderne, il avait truffé ses albums de chars, de stations-service au bord des via romaines. Les chars en question sont devenus chars de compétition, jusqu’à l’ultime tentation, celle d’un album consacré à la course.
Ce sera chose faite dans Astérix et la Transitalique, qui retrace la lutte acharnée entre un grand pilote romain au nom prémonitoire puisqu’il est baptisé Coronavirus et le héros gaulois. Toutefois, cet album dédié à la course et au pays des mille miglia n’est pas signé Uderzo et Goscinny, mais Didier Conrad pour le dessin et Jean-Yves Ferri pour le scénario. Ce dernier, également auteur du formidable De Gaulle à la plage, a rendu hommage au créateur des personnages dont il a repris les aventures. Et surtout à son goût immodéré pour les voitures italiennes, rouges de surcroit.
Car Albert Uderzo s’est amouraché des chevaux de Maranello assez jeune. Mais ses acquisitions ont commencé, et augmenté, en même temps qu’augmentaient ses droits d’auteur. C’est en 1975 seulement, alors qu’Astérix a 16 ans et que paraît La grande traversée et ses 1,3 million d’exemplaires, que son auteur s’offre sa première Ferrari. C’est une 365 GT4 Berlinetta d’occasion.
La suite est constituée d’autres modèles de grande diffusion, si ce terme est approprié pour la marque, mais aussi de supercars ultra-limités. Dans son garage de Neuilly se croisent alors une 308 GTB, ainsi que deux modèles F (40 et 50) et une 288 GTO. Des Ferrari de course vont également rejoindre l’écurie Uderzo, comme ces 512 M de circuit, 308 Pozzi, ou encore une 365 P2. Mais cette passion n’est pas seulement un doux passe-temps. Pour Uderzo, c’est une bouée de sauvetage. Celle qui va lui permettre, et il l’avouera bien plus tard, de surmonter la mort de son complice de gauloiseries, René Goscinny, qui succomba d’une crise cardiaque en 1977, le jour même ou Albert s’est offert la P2.
Une même crise cardiaque a eu raison de lui, 43 ans après son copain qu’il est allé rejoindre ailleurs, dans un petit village d’incorrigibles querelleurs. Mais nul doute que sur la place du village en question, un banquet les attend et, sous l’arbre ou le barde Assurancetourix est attaché, trône un bolide rouge. Uderzo est à son volant, et il a ouvert la portière du passager à son vieux pote René.
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