2. 600 km en BMW i3 : c'est trop !
Cet aller-retour à Bruxelles en BMW i3 s'annonçait sous les meilleurs augures. En théorie, cette citadine électrique pouvait rouler 300 kilomètres sans avoir à recharger. Et son conducteur était plein d'espoir. Récit de cette petite aventure qui ne s'est pas déroulée comme prévu. Sans pour autant remettre en cause le formidable espoir que sucite l'élan vers l'électrifiation.
LA BMW i3 EN BREF
- Prix : à partir de 39 950 euros
- Autonomie annoncée : 308 km
- Autonomie réelle : 250 km
- Puissance de recharge maxi : 50 kW
Cela faisait un moment que cette BMW i3 me faisait de l’œil ! En 2013, lorsque BMW l’a commercialisée, elle m’avait fortement impressionné. Par son design, tout d’abord. Il faut dire que cette citadine ne ressemblait à aucune autre auto. Elle est d’un point de vue esthétique toujours tellement novatrice avec ses portes antagonistes, ses vitres latérales en décroché, qu’aujourd’hui encore, six ans plus tard, elle se distingue toujours dans le flot de la circulation.
Alors bien sûr, quand Pierre Desjardins, le grand manitou de ce premier e-road trip de l’histoire de Caradisiac, est venu me dire qu’il m’avait affecté par hasard la Kia e-Niro pour faire l’aller-retour Paris- Bruxelles, j’ai insisté pour troquer cette brave Niro pour la i3 de mes rêves que je n’avais jamais conduite. Une doléance à laquelle Pierre a répondu avec empathie et amusement : «Tu sais qu’avec la BMW i3, il n’est pas certain que tu puisses rallier Bruxelles sans être obligé de recharger ».
Allons donc ! Direction le site web « via Michelin » qui me confirme la distance à parcourir : 295 km. Et comme tout utilisateur lambda éventuellement un peu angoissé à l’idée de tomber en panne, je m’empresse de me rendre sur le site de BMW pour vérifier l’autonomie réelle annoncée par le constructeur. Et dès la home page, je peux lire en grosses lettres : « 308 kilomètres d’autonomie ». Je l’annonce à Pierre qui, pourtant, continue d’afficher son sourire narquois. Deux précautions valent mieux qu’une, me dis-je ! L’auto, elle, ne saurait mentir. Elle m’attend tranquillement dans le parking de Caradisiac, gonflée à bloc. Start ! L’écran bleuté du tableau de bord m’éclaire le visage et affiche crânement 305 kilomètres d’autonomie. Héhé ! je sais que les Tesla et Niro de notre comparatif auront assez d’énergie pour aller en Belgique. Je sais que la Zoé n’y parviendra pas. Mais en revanche, je compte bien devancer la Leaf.
Intérieur design et matériaux écolo : l'habitacle de la i3 est un cocon
C’est donc, rassuré, dans la pénombre et le silence du parking que je peux découvrir en totale quiétude l’intérieur de cette BMW i3, qui, tout comme sa silhouette, frappe par son originalité. Ce n’est pas pour rien que la finition de notre modèle d’essai se nomme « Esprit Intérieur Loft ». On se croirait effectivement dans un lieu d’habitation au design épuré et stylisé. Le moteur est certes électrique, mais les matériaux qui composent l’habitacle, participent eux aussi de ce souci pour l’environnement. Laine naturelle, bois d’olivier, feuille d’eucalyptus, fibre végétale, plastique recyclé sont doux au toucher… et donnent bonne conscience.
Eh oui, ça compte et c’est un sentiment que je sens poindre en moi : ce n’est pas rien de s’apprêter à faire 600 kilomètres avec une empreinte carbone zéro. N’exagérons rien : je n’ai tout de même pas l’impression d’être un explorateur, de me trouver à l’aube d’une ère nouvelle, mais je comprends la satisfaction que doivent éprouver les « automobilistes électriques » et le plaisir qu’ont eu les journalistes de Caradisiac à tester avant moi cette i3.
Après cette première rencontre nocturne, je retrouve ma monture le lendemain matin pour le départ de notre e-road trip. Objectif : savoir s’il est possible de partir en week-end avec cette BMW i3. Pour les trajets quotidiens, pas de problème, mais est-elle capable de faire plus ? Pour 39 950 €, hors déduction, ce serait quand même mieux.
Vendredi 12h30 : toute la troupe sort de notre parking du 9e arrondissement de Paris en direction de l’autoroute A1. Durée du trajet : près de 45 minutes en raison des embouteillages et première déconvenue. J’ai l’impression que ma tête dodeline d’avant en arrière comme celle des chiens qui ornaient dans les années soixante-dix les plages arrière des autos. J’appelle au secours Pierre qui ferme la marche dans sa voiture balai. Il se veut rassurant, si on peut dire : « C’est une spécificité de la conduite électrique. La sensibilité de la pédale d’accélérateur n’est pas la même et le frein moteur est très important ». C’est tellement vrai qu’en ville, la forte décéleration suffit pour arrêter l’auto sans qu’on ait à freiner.
Trois recharges pour faire Paris-Bruxelles aller-retour,
c'est un peu trop !
Ce désagrément doit s’effacer avec le temps. C’est sans doute une question d’habitude. En revanche, bonne surprise après la première barrière de péage. La BMW i3 se révèle très vive au démarrage. Les 170 chevaux y sont pour quelque chose, mais c’est une autre caractéristique, positive celle-là, des modèles électriques : la puissance totale disponible immédiatement dès les premiers millimètres de la course de l'accélérateur.
Conséquence : vous recevez un vrai coup de pied aux fesses, comme à l’époque des feues turbo. Une poussée qui s’accompagne d’un petit bruit de fusée qui vous donne l’impression de piloter une auto de science-fiction.
Je suis sur un petit nuage, mais un contrôle des indicateurs lisibles sur le tableau de bord me ramène vite à la réalité. Nous roulons depuis une heure et j’ai déjà utilisé 40 % de l’autonomie, ce qui ne correspond pas aux 300 kilomètres indiqués au départ. J’informe Pierre qui me confirme qu’Alexandre Bataille avec sa Zoé est dans la même situation. Pour nous deux, un arrêt s’impose, sans quoi nous tomberons en panne avant d’atteindre Bruxelles. Nous nous arrêtons à la station-service Avia d’Harvincourt au kilomètre 172.
Et c’est là que prend fin l’utopie et que, dit de manière plus prosaïque, les galères commencent. Une recharge avec deux bras de recharge nous laisse penser qu’Alexandre et moi allons pouvoir recharger en même temps. Eh non, trop simple. A ce jour, nous ignorons toujours pourquoi... Alexandre ira dans la cambrousse à 15 km de là, tandis que la i3 va mettre 1h40 à se charger à 100 % via sa prise Combo CCS. Je vois le reste du convoi, Tesla en tête, poursuivre sa route tandis que je commence à méditer sur le chemin qu’il reste à faire à la plupart des autos électriques pour ne serait-ce que pouvoir partir en week-end à 300 kilomètres de chez soi. Le temps est long dans cette station et je rumine : l’i3 coûte près de 40 000 euros, mon plein d’électricité me prend un temps fou et je vais finir par mettre près de cinq heures pour rallier l’Atonium de Bruxelles, notre point de rendez-vous, contre trois heures si j’y étais allé en thermique.
Dur-dur, l’initiation ! La bonne petit i3 fait, par ailleurs, tout pour apaiser mon courroux et si ce n’est les sièges que je trouve trop durs et un tantinet inconfortables, je prends toujours du plaisir à me déplacer dans ce cocon silencieux.
Les 300 kilomètres du retour...
L'INCIDENT NOTABLE DU PARCOURS
Ce n'est pas véritablement un incident, mais un mécontentement dû à l'autonomie insuffisante de la BMW i3 qui m'a contraint à m'arrêter en tout 3h30 pour recharger. La BMW i3 est parfaite pour des parcours inférieurs à 250 kilomètres, pas au-delà.
Malgré les désagréments des conducteurs de la i3, de la Renault Zoé, et de la Nissan Leaf, il y a quand même comme une bonne humeur à l’arrivée à Bruxelles, comme si chacun de nous était tout de même content de ne pas avoir pollué pendant cette transhumance. Mais le retour vers Paris le lendemain me plongera de nouveau dans l’expectative. Au départ de l’hôtel, l’autonomie maximum affichée par l’ordinateur de bord n’est plus de 300 km, mais de 250 !
Je commence à consulter la bien utile appli ChargeMap avant d’utiliser finalement le GPS de la BMW qui en toute franchise m’indique que je ne pourrai pas rejoindre Paris sans charger. Il me propose de m'arrêter au Auchan de Valenciennes. Je n’ai pas une passion pour les grandes surfaces, mais je veux faire confiance à l’intelligence artificielle de mon automobile. Malheureusement, ce n’est pas un chargeur rapide. Pour recharger efficacement ma BMW i3, il me faut patienter deux heures. Au bout d’une heure, je n’en peux plus. Je décide de repartir chargé à 60 %, espérant que ce sera suffisant pour rejoindre Paris. Je me dis qu’en passant du mode éco au mode Eco +, je ne serai pas contraint de m’arrêter une nouvelle fois. En mode Eco +, l’auto se limite à 90 km/h, ce n’est pas prudent sur autoroute.
C’est bien la première fois que je risque une contravention pour vitesse insuffisante ! Hélas, mille fois hélas, après 45 minutes, je décide par sécurité de repasser en mode éco pour pouvoir rouler à au moins 110 kilomètres heure. Et une nouvelle pose s’impose. Cette fois, je mettrai juste ce qu’il faut d’électricité pour revenir à Paris, après 45 minutes d’arrêt quand même.
BMW i3 - LES ARRETS POUR RECHARGER
Trajet Paris - Bruxelles (départ batterie à 100%)
172e kilomètre - Aire d'Havrincourt - Type de chargeur : EV Tronic, durée de la charge : 1h40, pourcentage de charge : de 40 à 100 %, coût de la recharge : carte ChargeNow BMW
320e kilomètre (arrivée à Bruxelles) - Type de chargeur : Walbox, durée de la charge : la nuit, pourcentage de charge : de 60 à 100 %, coût de la recharge : gratuite
Trajet Bruxelles - Paris (départ batterie à 100 %)
103e kilomètre - Type de chargeur : DBT Auchan, durée de la charge : 1 h, pourcentage de charge : de 40 à 70 %, coût de la recharge : carte ChargeNow BMW
250e kilomètre - Aire de Ressons Est A1 - Type de chargeur : Fast charging Sanef, durée de la charge : 45 mn, pourcentage de charge : de 40 à 65 %, coût de la recharge : carte ChargeNow BMW
Alors, séduit ou pas ?
On vous le rappelle : nous souhaitions avec ce petit road trip savoir s’il est possible de partir en week-end avec une voiture électrique. Pour la i3, la réponse est mitigée. C’est possible, mais sans aller trop loin. Considérer que vous pouvez faire au maximum 250 kilomètres et si vous ne vous rendez pas chez vous, mais dans un hôtel et que vous souhaitez réutiliser votre auto le lendemain matin, il ne vous reste plus qu’à espérer que les chargeurs seront disponibles et qu’ils fonctionneront bien, ce qui ne semble pas être toujours le cas. Même angoisse si vous vous garez dehors.
Bref, l’auto électrique suscite à raison beaucoup d’espoir, mais pour l’heure, si son utilisation est parfaite pour les courts trajets, elle peine à nous rendre aussi libres au volant que les bonnes vieilles autos thermiques. Sauf à y mettre le prix : les Tesla qui permettent de rouler 500 kilomètres sont facturées à partir de 42 000 euros pour le Model 3. Mais la démocratisation est en route. Amis écologistes - si tant est que la voiture électrique est réellement écologique mais c’est un autre sujet - soyez patients ! Quant à moi, je suis séduit par le principe d'une voiture électrique, mais je vais attendre qu'elle coûte moins cher et qu'elle ait plus d'autonomie avant de craquer.
Claude Barreau
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