Stellantis quitte l'ACEA - "Le lobby des transports est nul!"
A la surprise générale, le groupe Stellantis annonce qu’il quitte l’ACEA, organisme que l’on présente comme le lobby des constructeurs auto européens, pour défendre sa propre approche des enjeux de demain. Décryptage.
Surprise ! Moins d’une semaine après l’officialisation de la fin de la vente de véhicules thermiques neufs en Europe en 2035, le groupe Stellantis, né de la fusion de Peugeot-Citroën et Fiat-Chrysler, numéro deux en Europe et numéro quatre à l’échelle mondiale, a annoncé lundi soir qu’il quittait l’ACEA (Association des constructeurs automobiles européens), organisme souvent présenté comme le « lobby » de l’industrie auto.
A la place, le groupe a annoncé son intention de créer dès le début de l’année prochaine un « forum sur la liberté de mouvement », qui fera notamment appel à « des représentants de l’industrie , des fournisseurs de mobilités, des universitaires, des politiciens et des scientifiques. »
« Les défis environnementaux qui nous attendent couplés à un environnement commercial en évolution rapide nécessitent une approche à 360 degrés efficace, globale et inclusive impliquant tous ceux qui souhaitent contribuer à la construction d'une mobilité durable », déclare Carlos Tavares, PDG de Stellantis. "Nous avons l'intention de créer un forum public dans lequel les contributeurs peuvent se réunir pour aborder les questions clés entourant le débat sur la mobilité décarbonée et proposer de prochaines étapes concrètes à prendre ensemble. L'accès à une mobilité propre, sûre et abordable pour les citoyens du monde entier est en jeu. »
Et Stellantis d’évoquer dans son communiqué une vision de la mobilité uniquement basée sur les faits, avec des travaux menés dans la transparence, et dont tous les intervenants doivent travailler et avancer dans le respect mutuel.
Faut-il en déduire que la façon de travailler de l’ACEA, organisme qui ne rassemble plus que 15 groupes eu lieu de 16, ne répondait pas (ou plus) à ces critères ?
« L’avenir est dans le logiciel »
Même si l’on ignore encore à peu près tout de ce futur « forum Stellantis » et de son mode de fonctionnement réel, sa création apparaît comme une réponse directe au manque de résultats de l’ACEA qui, rappelons-le, n’a pu empêcher la disparition du moteur thermique sur les voitures neuves programmé à l’horizon 2035 (et même plus tôt dans les faits, sachant qu’aucun constructeur généraliste ne va plus engager désormais des millions pour développer de moteur thermique).
Un fin connaisseur de l’industrie automobile, interrogé ce matin par Caradisiac, décrypte les choses sans langue de bois, mais sous couvert d’anonymat: « on sentait depuis quelques temps une fracture au sein de l’ACEA entre les constructeurs allemands et les autres, à quoi s’ajoutait un manque notoire d’efficacité du précédent Directeur général, tout récemment débarqué. Or, Carlos Tavares a aussi été le Président de l’ACEA jusqu’en 2019, et il en connaît bien le fonctionnement. Et s’il a obtenu l’aval de John Elkann pour quitter l’ACEA, cela veut bien dire quelque chose. Ce que l’on présente comme le lobby des transports est nul, et ça a pour conséquence une Europe qui s’enfonce en multipliant les interdictions alors même que la vision américaine fait bien plus appel à la matière grise. L’avenir de l’automobile réside dans le logiciel, et les champions en sont les Américains. Cela se traduit par le retour de l’industrie auto américaine au premier plan, comme on le voit avec Tesla. Et regardez Jeep, qui assure des marges monstrueuses avec le thermique tout en opérant progressivement sa transition vers l’hybride. Les Américains sont beaucoup plus performants, tout simplement ! En agissant ainsi, Carlos Tavares met un grand coup de pied dans la fourmilière. Avec l’arrêt du thermique, ça va être la grande casse pour l’automobile en Europe. »
Et quand on l'interroge sur une stratégie qui aurait consisté pour Stellantis à rester au sein de l'ACEA tout en animant son propre groupe de pression parallèle, notre interlocuteur résume les choses simplement: "cela coûte cher, d'adhérer à l'ACEA! Et comme chacun sait, Carlos Tavares est près de ses sous..." Cost killer jusqu'au bout, donc. Et jusqu'ici, difficile de trouver grand chose à redire sur l'efficacité du management à la Tavares en matière de gestion et de capacité à générer du profit.
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