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Sorti du brouillard, Alpine veut se frotter "à des monstres sacrés"

Luca de Meo veut faire d'Alpine un mix de mini-Ferrari et de mini-Tesla. La future gamme sera composée de trois modèles électriques.

Sorti du brouillard, Alpine veut se frotter "à des monstres sacrés"

De Paris à Dieppe, nous n’avons guère vu le paysage. Ce dernier vendredi de janvier, le trajet s’est fait dans le brouillard. Ce n’est qu’en arrivant au fief d’Alpine que la vue s’est dégagée. Luca de Meo ne s’en est pas privé d'une métaphore facile avec la marque. Le directeur général du groupe Renault a dit qu'il n'y avait plus de brouillard sur l’avenir d’Alpine.

Ce jour-là, la visite de l’usine en compagnie de Bruno le Maire, ministre de l’Économie, avait pour but d’officialiser la pérennisation du site avec la production du premier SUV d’Alpine. De quoi soulager les salariés (et les élus locaux), le futur de l’usine historique de la marque fondée par Jean Rédélé ayant un temps été remis en cause… peu de temps après la relance d'Alpine !

Exit Renault Sport

Car passée l’euphorie du lancement, les ventes de l’A110 moderne se sont bien tassées. Début 2020, il n’y avait plus que sept véhicules par jour qui sortaient de la chaîne d’assemblage. Or, à ce moment, Renault était au plus mal financièrement. Dans le cadre de l’élaboration d’un vaste plan d’économies, Jean-Dominique Senard, nouveau président du Losange, n’avait donc pas caché qu’une usine qui produit si peu, ce n’était "pas raisonnable". Il n’était toutefois pas envisagé de mettre fin prématurément à la renaissance d’Alpine, la direction étant consciente du potentiel du label.

Et son avenir a rapidement été validé par Luca de Meo quand celui-ci est arrivé au poste de directeur général mi-2020. Spécialiste du produit, l’italien, qui a par exemple détaché Cupra de Seat, a conscience de l’importance d’Alpine. Dans le cadre d’une réorganisation du groupe en quatre « business unit », il en a fait le label sportif, le seul. L’une de ses premières décisions était à la fois symbolique et radicale : remplacer Renault par Alpine en Formule 1.

La compétition automobile est avant tout une vitrine pour vendre des voitures de série, la F1 a donc pour mission de booster la notoriété d’Alpine dans le monde, alors qu’une large majorité de la production d’A110 est écoulée en France. Quitte à sacrifier Renault Sport. Mais Alpine vend des voitures plus chères qui rapportent davantage ! Et Luca de Meo ne pouvait rêver mieux : dès sa première saison, Alpine a remporté une victoire.

Sport et premium

Le tour de passe-passe marketing a permis à Alpine de devenir l’une des marques les plus présentes en sports mécaniques. L’engagement en endurance n’a ainsi pas été remis en cause, il a même été renforcé avec l’arrivée de la marque en LMP1. Alpine est aussi visible en rallye FIA R-GT. Selon de Meo, Alpine montre ainsi qu’il joue "dans la cour des grands". Le boss n’hésite pas à dire qu’il souhaite venir "se frotter à des monstres sacrés" de l'automobile. D'après lui, la marque est une sorte de "mini-Ferrari", pour l’aspect compétition, et de "mini-Tesla", pour la gamme. Tesla, car les prochaines voitures d’Alpine ne seront qu’électriques.

Trois nouveautés ont été annoncées, lancées à partir de 2024. La première sera une citadine dérivée de la R5, avec un bloc de 218 ch et un look revu en profondeur. Puis il y aura le SUV, attendu début 2025 et qui devrait être capable de proposer entre 350 et 400 ch. Enfin, il y aura une suite à l’A110. Pour cela, Alpine s’est associé à Lotus. De Meo nous a expliqué : "Sur ce segment-là, il n'y a pas trop de volumes, mais il y a beaucoup d'investissements pour faire une voiture qui sera amusante, on a donc besoin de partager l'investissement". La firme anglaise a d’ailleurs teasé récemment son modèle, avec une silhouette qui évoque l’Esprit.

Avec ces trois véhicules, Alpine veut séduire un plus large spectre de conducteurs, même si Luca de Meo dit qu’Alpine va d’abord s’adresser "à une clientèle de passionnés". Le but est aussi bien sûr de venir chasser sur les terres du premium. Avec le sport, c’est là l’autre vocation d’Alpine. Luca de Meo a d’ailleurs bien replacé Renault en tant que marque généraliste classique, qui n’a pas pour mission de faire du haut de gamme.

Une future A110 made in UK ?

Pour qu’Alpine soit donc à part dans le groupe, il lui fallait garder une usine rien qu’à elle, qui plus est son usine historique. De Meo a d’ailleurs dit que "l’âme des marques est dans ses racines". Il a renommé le site de Dieppe avec le nom de Jean Rédélé. Ou plutôt on doit dire la manufacture, c’est plus chic, et cela évoque le luxe à la française de la haute couture. La manufacture va surtout être un lieu d’assemblage final. La plate-forme et la caisse à nue du SUV viendront de Douai ! La chaîne va donc être le point de réunion avec les moteurs, venus de Cléon, et les batteries, aussi made in Douai.

Il fallait maintenir un symbole important pour le storytelling, mais avec un impératif : être rentable. Luca de Meo a ainsi rappelé qu’il a fixé à Laurent Rossi, directeur de la marque Alpine, un objectif clair : être rentable dès 2025. La version Alpine de la R5 sera assemblée sur la même chaîne que cette dernière, à Douai. Et pour l’A110 ? Luca de Meo nous a expliqué que le lieu n’avait pas encore été choisi. Quand on évoque une possible production en Angleterre avec Lotus, il répond "on en parle, on va voir ce qu'on va décider en fonction de l'équation économique".

L'avenir d'Alpine est donc une question d'équilibres : du sport et du premium, de la passion et de la raison.

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