Pourquoi les Chinois aiment beaucoup plus les voitures électriques que nous ?
L'INFO DU JOUR - Les ventes d'autos à batterie sont en hausse de près de 17 % en Chine alors qu'elles stagnent, au mieux, ou sont en baisse en Occident. Quelles raisons peuvent bien expliquer cet engouement ?
Ce 9 janvier, au siège pékinois de la fédération des constructeurs chinois, c’est la fête. Le sourire, parfois de circonstance, des dirigeants de l’automobile nationale est, cette fois-ci, sincère. Ils annoncent les chiffres 2024 et ces derniers sont pour le moins radieux. Surtout, ils sont totalement à l’opposé de ceux que l’on connaît en Amérique et en Europe.
Dans ces deux régions l’électrique stagne, au mieux, et au pire, recule. À l'inverse, en Chine, cette technologie est en hausse. En 2023 il s’y est vendu 5,4 millions de VE. Pas mal, mais 2024 s’est terminée sur un score bien meilleur encore, de 6,3 millions d’unités écoulées, soit près de 17 % de hausse.
Tout le monde veut passer à l'électrique
Rien qu’au mois de décembre, 762 000 autos à batteries se sont vendues dans l'Empire du milieu, battant le record mensuel du genre pour le quatrième mois consécutif. Et cette flambée est loin d’être achevée : selon la Deutsche Bank, la hausse devrait être du même niveau en 2025. Les Chinois aiment tellement la voiture électrique que 97% de ceux qui doivent changer d’auto envisagent d’en passer par là, selon une étude réalisée par le cabinet conseil AlixPartners. Pour rappel, ils ne sont que 35% d’Américains dans le même cas, et 43% chez nous.
Mais pourquoi un tel engouement ? Pour une raison très simple : la Chine a vaincu la plupart des réticences suscitées chez nous par ce nouvel usage. Une victoire qui s’est déroulée elle aussi pour une raison toute aussi simple : l’afflux d'argent, les centaines de milliards de yuans que Pékin a posé sur la table pour doper son industrie et inciter ses concitoyens à craquer pour les watts.
Ce que l’on reproche le plus souvent aux VE par chez nous c’est leur prix exorbitant par rapport aux thermiques. En Chine, c’est l’inverse : elles sont moins chères que les pétrolettes. Comment ? Grâce à l’État qui aide financièrement les constructeurs à tous les niveaux. En les subventionnant lors de l’installation de leurs usines (comme nous), en les subventionnant pour leur R&D (comme nous aussi). Sauf que les sommes en jeu en Occident et en Orient ne sont pas du même niveau. Pékin aurait investi plus de 215 millions d’euros en quelques années dans l’électrification des autos. Et les robinets ne sont pas fermés.
En parallèle de ces aides directes, l’État chinois a massivement acheté des autos électriques pour l’ensemble de ses services, et il a mis en place, et payé, un vaste plan d’installation de bornes de recharge pour quadriller son immense territoire.
Des soupçons d'esclavagisme
Les Chinois sont donc rassurés : ils peuvent recharger leur Byd (qui détient un tiers des parts du marché local de l’électrique) sans souci. Mais pourquoi est-elle moins chère qu’une auto thermique ? Outre les différentes subventions de Pékin, la Chine, contrairement aux États-Unis et à l’Europe, ne réduit pas son bonus à l’achat : elle l’a augmenté l’an passé et la prime offerte aux acheteurs représente aujourd’hui 15% du prix d’achat d’une voiture.
Mais si les autos s'affichent là-bas avec un prix très bas, c’est aussi parce que les constructeurs chinois ont tendance à pressuriser leurs fournisseurs d’une manière qui ferait passer Carlos Tavares pour un dirigeant d’ONG. C’est ainsi qu’un sous-traitant brésilien de Byd, encore lui, est accusé d’esclavagisme au nord-est du Brésil. L’entreprise qui construit une usine pour le compte du Chinois (jugé coresponsable) est soupçonnée de faire travailler des ouvriers plus de 70 heures par semaine, sans jour de repos, sans matelas pour dormir et en leur confisquant leur passeport pour ne pas qu’ils s’échappent.
Autant de méthodes plus ou (beaucoup) moins respectables qui, logiquement, permettent de faire baisser le coût des autos, et de les rendre accessibles à tous. On comprend mieux le souci de l’Union européenne de vouloir surveiller de près l’installation d’usines chinoises sur le vieux continent. Mais Bruxelles peut se rassurer. Ses droits de douane augmentés, comme ceux de l’administration européenne semblent avoir refroidi les marques chinoises. Pour le moment du moins. Lors de sa présentation du 9 janvier, la fédération des constructeurs a bien prévu des hausses des ventes de ses voitures électriques, mais en Chine seulement, pas à l’étranger.
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