2. Maserati Gran Turismo (2023) – Sur la route : plus Aston Martin DB11 que Bentley Continental GT
Il fait -2 degrés Celsius lorsque nous démarrons le moteur à pistons de notre Gran Turismo Trofeo, un exemplaire de la série spéciale PrimaSerie en Grigio Lameria mat. Plutôt discret à froid au ralenti, ce V6 ressemble de très près à celui de la MC20 Coupé essayée l’année dernière sur Caradisiac. Il s’agit du même Nettuno de 3,0 litres, mais avec un carter humide à la place du carter sec de la super-sportive et une boîte automatique ZF au lieu de la transmission à double embrayage de sa sœur plus radicale. Des changements opérés pour optimiser la douceur d’utilisation de la machine. Sur ce point, la Gran Turismo tient son rang et joue les déplaçoirs raffinés avec beaucoup d’aisance : outre un groupe motopropulseur dont seul le discret vrombissement trahit sa sportivité en conduite tranquille, l’Italienne bénéficie aussi d’un amortissement -pneumatique- onctueux sans procurer pour autant l’effet « tapis volant » d’une Bentley Continental GT ou d’une Rolls-Royce Wraith. Équipé d’une inédite fonction de désactivation des cylindres, le V6 Nettuno siffle un peu moins de 13 litres aux 100 km sur notre parcours arpenté à rythme tranquille avec de l’autoroute et des portions routières peu intéressantes. Dans des conditions de la vie de tous les jours, la Gran Turismo fait honneur à son patronyme.
A la faveur d’une portion de route à peine moins mauvaise et inintéressante que le reste du parcours de notre essai, passons maintenant du mode Comfort à la position Corsa pour voir si cette grosse voyageuse peut jouer les vraies sportives (le sélecteur comprend aussi des modes GT et Sport intermédiaires). La tonalité du V6 bi-turbo s’intensifie immédiatement dans l’habitacle, avec une sonorité malheureusement complétée artificiellement par un système acoustique utilisant notamment le système audio de la voiture. La poussée du moteur devient tout de suite conforme aux promesses de la fiche technique (0 à 100 km/h en 3,5 secondes) et la boîte de vitesses automatique surprend favorablement par sa rapidité en mode manuel. L’amortissement pneumatique se raffermit mais ne se désunit pas sur le tarmac horriblement bosselé de nos routes d’essai. La direction s’alourdit et semble correctement calibrée pour attaquer. Malheureusement, difficile d’aller plus loin dans ce cadre d’essai : entre les pneus hiver, l’étroitesse de la chaussée ou son manque de visibilité et d’une variété de virages suffisantes, on ne fait qu’entrapercevoir le potentiel de l’auto. L’essai permet déjà de constater que la transmission intégrale de série, répartissant le couple entre 20/80% et jusqu’à 50/50% au maximum sur l’avant et l’arrière, permet de conserver une motricité impériale dans ces conditions glissantes. Et qu’une fois poussée à fond, la Gran Turismo offre des sensations de pilotage plus sportives qu’une Bentley Continental GT.
Entre la bande sonore enjouée du V6, l’excellente réactivité des grosses palettes fixes de la boîte de vitesse, le freinage solide malgré une attaque de pédale un peu molle et de bonnes remontées d’informations de la part du châssis comme de la direction, on s’amuse. Davantage qu’au volant d’une Bentley Continental GT, au tempérament beaucoup plus filtré même si la lourde Anglaise sait faire preuve d’une efficacité dynamique imperturbable. En terme de ressenti en conduite sportive, la Gran Turismo se rapproche plus d’une Aston Martin DB11 AMR mais avec une meilleure motricité. Une GT oui, mais avec un tempérament suffisant pour rendre les montées de cols excitantes. Souple, elle prend du roulis mais avec une caisse bien tenue et un amortissement efficace.
Et maintenant, la foudre
Après notre balade routière en Gran Turismo Trofeo thermique et sans avoir eu le temps d’essayer la Gran turismo Modena dotée du même V6 bi-turbo mais dégonflé à 490 chevaux au lieu de 550 (et équipée d’un différentiel à glissement limité mécanique sur le train arrière au lieu du différentiel électronique), nous nous retrouvons sur le circuit de Vallelunga pour faire quelques tours au volant de la Gran Turismo Folgore électrique. Si les Gran Turismo thermiques essayées sur la route sont des modèles finaux, les exemplaires à zéro émission de pré-série présentent toujours de gros boutons rouges et autres systèmes de développement installés à bord.
Dotée d’une batterie d’une capacité brute de 92,5 kWh (83 kWh net) installée à la place du tunnel de transmission et du moteur thermique, la Gran Turismo Folgore possède trois moteurs électriques radiaux : le premier installé à l’avant entraîne les roues directrices et les deux autres se connectent chacun à une roue arrière pour jouer ainsi les différentiels intelligents et générer du vrai torque vectoring. Dès la première accélération sur circuit, la Gran Turismo Folgore pousse plus fort que la Trofeo thermique de 550 chevaux (0 à 100 km/h annoncé en 2,7 secondes et 0 à 200 km/h expédié en 8,8 secondes au lieu de 11,4 secondes), grâce aux 760 chevaux de puissance cumulée et aux 1 350 Nm de couple. Équipée de vrais pneus été sport seulement optionnels (de série la Folgore recevra des gommes plus tournées vers l’économie d’énergie), la Gran Turismo électrique résiste du mieux qu’elle peut au sous-virage malgré les 450 kg en plus (2 260 kg au lieu de 1 795 kg pour les versions thermiques), sans pouvoir faire de miracle. Dépourvue des roues arrière directrices magiques qu’on retrouve par exemple sur une Porsche Taycan Turbo S, elle se montre plutôt agile à l’inscription (merci le torque vectoring ?) et accepte tout de même de pivoter au lever de pied. Avec un tel couple et une transmission au typage tourné vers la propulsion (jusqu’à pouvoir envoyer parfois 100% du couple vers l’arrière) , la Folgore accepte aussi de finir ses virages par les portières avec de la fumée.
L’équipe de Maserati, qui laisse entendre que la Folgore serait plus rapide que la Trofeo thermique sur un tour chronométré, concède que la Gran Turismo électrique ne peut pas tenir trop longtemps sur circuit avant de surchauffer ses batteries. Et que ses performances se réduisent inévitablement avec le déchargement des batteries, forcément rapide dans ces conditions peu adaptées à une telle auto. Malgré une pédale à l’attaque moins franche que celle de la version thermique à cause de la récupération d’énergie (et ces sensations si déroutantes du pilotage d’une sportive électrique sur circuit !), la Folgore paraît au moins aussi performante qu’une Porsche Taycan Turbo S dans ce cadre. Sans pouvoir tester la Folgore sur route pour l’instant, on ne pourra pas vous dire si elle peut approcher les 450 km d’autonomie WLTP inscrits sur sa fiche technique. Sur circuit évidemment, cette autonomie part en fumée presque aussi vite qu’une Bugatti Chiron ne vide son réservoir à pleine vitesse. Voilà sans doute aussi pourquoi Maserati a installé pour l’occasion des chicanes artificielles sur les portions les plus rapides du tracé, ne permettant pas non plus de s’approcher de la vitesse maximale annoncée à 325 km/h. Notons que grâce à son architecture électrique à 800 Volts, elle peut se recharger à 270 kW en courant continu (20-80% en 18 minutes). En courant alternatif, elle accepte aussi une puissance de 22 kW.
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