Fusion Honda - Nissan : à quoi joue Mitsubishi ?
L'INFO DU JOUR - Nouveau rebondissement dans le regroupement annoncé entre Nissan, Honda et Mitsubishi : ce dernier semble décliner l'invitation. Pourquoi le plus petit des trois préfère-t-il jouer en solo ? Explications.
C’est un pari à haut risque. La décision de Mitsubishi de ne pas participer à la maxi-fusion en cours entre Nissan et Honda est une volte-face en rupture avec les pratiques en cours dans l’industrie auto. Car la tendance est plutôt au regroupement maximum, histoire d’affronter en groupe les tempêtes présentes et à venir.
Mitsubishi, lui, préfère continuer à jouer en solo. Du moins selon la presse japonaise qui, depuis le début des pourparlers pour la formation du nouveau groupe, ne s’est guère trompée. D’ailleurs, dès la publication de l’info, la marque n’a pas démenti, louvoyant plutôt en affirmant qu'elle « envisageait différentes possibilités et n'avait pas encore décidé d'une direction spécifique ».
Mieux vaut un petit chez soi qu’un grand chez les autres ?
Une valse-hésitation que les investisseurs ont prise pour un « merci, mais non merci ». Résultat, l’action de Mitsubishi a dévissé de 6 % à la Bourse de Tokyo. Mais cette envie du constructeur de faire cavalier seul est-elle une si mauvaise idée ?
De fait, Mitsubishi n’a pas du tout envie de se voir tellement intégré dans la nouvelle structure qu’il pourrait en être désintégré, entre le tout-puissant Honda et le faiblard Nissan qui détient néanmoins 24% de ses parts et compte dessus pour les emporter dans la corbeille de mariage. Car le petit Japonais ne se porte pas si mal malgré sa taille riquiqui et qu’il fabrique, bon an mal an, moins de 900 000 autos contre 3,4 millions en 2023 et 4,2 millions pour Honda. Sauf que s’il vend près de quatre fois moins de voitures que Nissan, Mitsubishi dispose d’une marge opérationnelle de 6,9%, alors que son concurrent-actionnaire espère difficilement frôler les 1 %.
Mais qu'est ce qui explique cette relativement bonne santé de Mistubishi dans un monde où seuls les mastodontes sont donnés gagnants ? La marque, qui s’est peu à peu dégagée de l’étreinte de l’ex-Alliance Renault Nissan, ne place pas ses billes dans le même panier et travaille, région par région, en se spécialisant.
À l’Asie du Sud-Est et aux US, elle réserve ses lourds pick-up et ses gros SUV qui représentent 52 % de ses ventes. Au Japon, la marque se concentre sur ses kei-cars, et en Europe, Mitsubishi ne jure que par un nom, ou presque : Renault, dont il rebadge le Captur, qui devient ASX et la Clio qui se transforme en Colt. Mais une vraie Mistu ne va pas tarder à débouler chez nous, puisque, après quatre ans d’absence, l’Outlander va faire son retour.
Mitsubishi entend donc continuer son petit bonhomme de chemin en solo avec des alliances industrielles de-ci de-là. Mais cette route semée de fleurs ne saurait se dérouler que dans un monde parfait. Dans la vraie vie, comment Nissan, qui détient toujours 24 % de la marque va-t-il réagir à cette volte-face ?
Car Mitsubishi veut continuer à travailler avec ses deux ex-futurs associés, notamment dans le développement de modèles électriques qu’il a, bien évidemment, du mal à assumer seul. En Europe, le petit Japonais n’a pas trop de mouron à se faire, puisque ses relations avec Renault sont au beau fixe et qu’après les Captur et Clio, il pourrait bien coller ses trois diamants sur une base de Scenic e-tech et de Symbioz.
La marque japonaise risque donc d’entrer dans une zone troublée, mais c’est en vieil habitué des tempêtes. Elle en a connu dès la fin des années 90, et s’est retrouvée adossée à Daimler à l’époque acoquiné avec Chrysler. Quelques années plus tard, elle a fait face à un énorme rappel de 800 000 voitures avant d’être sauvé de la faillite par la banque américaine Morgan Chase.
Une histoire semée d'embûches
Nouveau rebondissement en 2016 : Mitsubishi avoue avoir utilisé un logiciel pour falsifier les tests d’homologation façon Volkswagen. Nissan en profite pour se jeter sur le constructeur mal en point et Carlos Ghosn en devient le président. La suite est connue : l’Alliance explose en vol, et Mitsubishi est livré à lui-même, même si Nissan dispose toujours de 24% des actions, après s’être débarrassé de 10 % d'entre elles.
Autant dire que les nouvelles turbulences de la marque aux trois diamants ne devraient pas faire perdre leur zenitude à ses dirigeants qui en a vécu bien d’autres.
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