2. Comparatif - Honda NT1100 Vs BMW R1250 RS : impériale ou impérieuse, votre rouleuse ?
Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce comparatif commençait très mal pour la NT 1100. À peine sortie du parc presse Honda qu'elle subissait un shimmy impressionnant lorsque nous tentions de vérifier l'alignement du guidon en lâchant le guidon. Un cintre tordu au niveau d'un coude et des pontets trop peu serrés (comme le carénage supérieur et le déflecteur gauche au demeurant) faisaient aussi partie du lot. Sans oublier un frein de parking inopérant, probablement séquelles d'une chute non signalée ou mal réparée.
Sans parler des suspensions résolument trop souples et manifestement non réglées pour supporter la bagagerie et son éventuel chargement. Bref, cela n'arrangeait pas les affaires de la Honda et pas non plus le comportement à vitesse autoroutière ou en virage négocié en conduite zélée. Il faut dire que, contrairement à celles de la BMW, réglables en tous sens électroniquement et avec outils si l'on n'opte pas pour l'option, le mono amortisseur arrière et la fourche ne sont ajustables qu'en pré-contrainte et de manière mécanique. Au moins peut-on durcir l'arrière en roulant, ce qui améliore considérablement le comportement sans permettre de totalement se lâcher.
De quoi contraster furieusement avec une BMW au top de sa forme, mais toujours un peu lourde au démarrage et à basse vitesse, avant de devenir un véritable rail, soit l'opposé total de la Honda. Deux philosophies se dégagent donc instantanément : l'une pour le sport, l'autre pour la route et le point commun : la possibilité de voyager grâce à des bagages intégrables. Avec son train avant rivé au sol là où celui de la Honda a une furieuse tendance à vouloir danser, la RS impose son rythme sans pour autant se montrer trop physique, juste copieusement posée au sol.
Comportement routier
De son côté, la NT est une évidence. Une de ces motos qui mettent à l'aise. Physiquement, pour commencer. Notamment grâce à une posture plus confortable et plus agréable en ville comme sur long trajet. À hauteur de selle comparable, elle est plus relax, tout simplement. La Honda bénéficie aussi d'une partie cycle plus instinctive, de dimensions et elle propose une aisance naturelle propre aux Honda là où la Boxer est moins intuitive à première vue et paraît plus lourde à manœuvrer. La faute à une posture plus basculée sur l'avant et aux commandes aux pieds plus relevées, même si la stabilité de l'allemande demeure exemplaire à plus d'un titre.
Chacune à leur manière, les masses sont bien réparties sur les deux motos, les rendant agréable à mener, à manier, mais la Honda conserve un avantage en se montrant plus intuitive et particulièrement agile, limite trop légère de direction, tandis que la bagagerie moins bien intégrée gène davantage, y compris en agglomération : le syndrome gros quick a frappé. On retrouve de la superbe lorsque l'on enlève le top case (qui modifie considérablement le comportement) et les valises, tandis que la R 1250 RS profite d'éléments totalement transparents à la conduite. Y compris chargés. Une pure réussite.
Dernier point influant sur les sensations : les pneumatiques. Du Dunlop GPR 300 sur la NT 1100. Une monte voulue citadino-sportive et résolument usée au carré à l’arrière. Elle donnait une mise sur l'angle pour le moins curieuse, là où la monte purement routière et signée Metzeler de la BMW est bien plus en adéquation avec la vocation routière de la moto et son potentiel. Les GPR sont cela dit parvenus à mettre en pleine confiance et à encaisser les fortes contraintes opérées sur leur carcasse, tout en laissant présager qu'il serait possible de gagner en tenue de route avec une monte un peu moins "sportive" en apparence. Bien plus cohérente et homogène, la R 1250 RS est particulièrement bien servie par ses Metzeler, mieux usées et au profil très progressif et routier.
Alors, afin d'équilibrer les chances et de voir si le constat opéré par Pierre lors de son essai tenait toujours (problème d'amortissement), nous avons simplement réglé les suspensions électroniques de la RS au plus ferme pour les bienfaits de la trajectoire et de l'incisivité de la moto, tandis que la NT nous mettait au défi de trouver le bon compromis de réglage. Le résultat fut assez simple : pré contrainte à fond à l'arrière (que nous avons libérée un peu en roulant, tour par tour pour revenir à un peu plus souple) et de nombreux tours de pièce de 5 cents sur la fourche pour lui permettre de supporter le traitement des bosses de la route, mais aussi tenter de la rendre moins sensible. Et ça marche.
Après maints ajustements conservant un peu de confort et surtout de feeling dans le train avant, la trajectoire de la moto aux ailes devenait plus précise, moins élargissante en entrée de courbe et moins dodelinante (avec les bagages) tandis que la BMW propose encore et toujours une indéfectible rigueur, pour ne pas dire une bonne fermeté dans le mode Sport des suspensions. Sans oublier un confort appréciable dans l'autre proposition disponible (Road), mais au détriment de la trajectoire, qui s'élargit. Un réglage rendant la moto bien moins agile, donc, mais un peu plus appréciable sur petites routes défoncées une fois le postérieur fatigué par les kilomètres enchaînés.
Consommation
Une pause essence plus fréquente sur la BMW, qui n'est pénalisée que par la capacité de son réservoir de carburant, inférieure de 2 litres à celui du NT, mais pas par sa consommation. Toutes deux peuvent tomber en réserve à plus de 50 ou 100 km d'écart en fonction du rythme imposé, mais toujours à la faveur de la Honda. La BMW s'incline, donc, mais elle sait se montrer très économe, même avec sa bagagerie, là où rouler chargé et avec une prise au vent supérieure augmente la consommation de la Honda de l'ordre de 1l/100 km. Notamment si l'on roule avec le pare brise en position haute. La bulle de l'allemande est moins couvrante : on ne peut pas rouler écran de casque ouvert, par contre, on respire mieux derrière ! Idem : la moindre protection du bas du corps permet de mieux ventiler. Avantage BMW, d’autant plus que…
Chauds les marrons chauds !
De fait, la NT 1100 est supérieure à la R 1250 RS à de nombreux égards en termes de confort pur (selle confort), mais elle est pénalisée par un moteur chauffant beaucoup trop les jambes. Un point déjà levé par Pierre. Une fois à température de fonctionnement et surtout si l'on s'arrête, le 2 cylindres prend des calories à la vitesse de l'éclair et ne les perd que très difficilement, très lentement, devenant d'autant plus brûlant qu'un petit vent latéral déporte la chaleur sur les mollets et cuisses. Insupportable. En été, une fournaise que seul un bon pantalon peut temporairement contrer.
Moteur et transmission
Niveau moteur, deux écoles. Celui de la BMW est plus fort en sensations, mais quelque part un peu moins expressif, notamment niveau sonore et même avec une cartouche adaptable. De fait, il est plus puissant de 25 kW, profite d'une cylindrée supérieure et surtout du comportement Dynamic pour le moins agréable et offrant les réactions les plus pures. D'autant plus que l'on peut aisément désactiver l'anti patinage. Par contre, l'accélérateur électronique manque de répondant au regard de celui de la Honda, même s'il n'y a pas photo niveau accélération ou performances brutes.
La boîte de vitesses de la R, sans reproche, fait parfois ressortir la transmission par cardan légèrement trop présente par moments au regard de la transmission par chaîne proposée par la Honda. Notamment lors des rétrogradages ou des changements de rapport. De même, le shifter manque de souplesse lorsqu'il n'est pas utilisé dans les tours. Dommage, mais agréable quand même : c'est onctueux et ça a de l'allonge. Certes l'entraînement est plus direct, mais le poids de l'arbre se fait sentir, tout comme son mouvement, plus restreint. Au moins, elle s'inscrit d'un bloc en virage.
L'atout DCT
La grande force de la NT 1100 pour tirer son épingle du jeu ? Son DCT. Addictif. Au fil des kilomètres, nous sommes parvenus à l'exploiter pleinement. Immédiatement, le mode Drive est proscrit tant il donne l'impression de conduire un engin agricole, passant les rapports précocement et cognant exagérément notamment en voulant rouler en 6 à 55 km/h, ce que permet la BMW de son côté avec nettement plus de panache. Sauf à être amateur de moteur qui tremble et peine en permanence, on passe en mode User ou Sport et l'une de ses trois variations. Ce qui change entre les niveaux proposés ?
Le régime de passage automatique du rapport supérieur, décalé de 1 000 à 1 500 tr/min vers le haut, il permet de faire ronfler le bicylindre et de profiter d'une force insoupçonnée. Si la R 1250 RS a la roue avant rivée au sol, celle de la NT se soulève volontiers sur les plus vives accélérations. Elle passe même les rapports une fois celle-ci en l'air. Le tout sans danger aucun : on repose en douceur tant la transition est transparente, tout en disposant d'une énergie supérieure, agréable et plus que suffisante pour provoquer du plaisir de rouler et de jouer.
Jouer avec les gâchettes pour commencer, ce que l'on fait instinctivement pour descendre les rapports, faire pétarader le moteur et profiter d'un frein moteur au demeurant réglable. À la montée, on le fera uniquement pour éviter de faire ronfler le moteur lorsqu'il ira chercher ses tours. Ainsi emmenée, la NT devient un outil du quotidien et très agréable sur route, tant que l'on ne vient pas trop en demander à ses suspensions. Jouer avec le dynamisme du moteur, ensuite. Mais à la longue, sa sonorité et son comportement très trail crosseux (normal, il est issu de l'Africa Twin), peut faire ressortir le côte paradoxal d'un tel moteur dans une partie cycle de routière. D'autant plus que le mode de passage de vitesse manuel totalement superflux et n'apporte pas grand chose à l'usine à gaz des commodos. Par contre, passer les rapports en mode automatique à l'aide de la gâchette devient rapidement addictif, et manque lorsque l'on reprend la BMW.
Loin devant, la RS affirme "haut et sport" qu'elle est la meilleure. Elle dispose de plus de rondeur, se montre plus suave et plus cajolante, grâce à son instrumentation et surtout aux sensations matérialisées au moyen de la sonorité unique de son bicylindre à plat. Niveau sensations moteur et mécaniques, pourtant, la NT n'a pas à rougir, même si elle vibre bien plus que sa concurrente du jour. Enfin, il se montre joueur tant que le côté "agachiant" des commandes à la main, qui interfèrent régulièrement avec les réglages et les affichages du fait de "missclics" (les fameux appuis accidentels connus des informaticiens), ne vient pas vous faire râler dans le casque. En attendant, la 1250 se marre, elle pour qui tout est si simple et si évident, elle qui est une moto et non pas un ordinateur sur roues. Elle en fait plus, et elle le fait mieux. Et toc !
Freinage
Freiner tout ce petit monde se fait par contre sans effort. De ce point de vue, la BMW offre les meilleurs éléments et réduit les distances autant qu'elle augmente le feeling au levier et sous la semelle. Plus feutré une fois de plus chez Honda, avec un toucher plus léger caractéristique de la marque, le freinage japonais officie avec bienveillance et sans excès. Du coup, l'ABS ne se déclenche que sur commande, mais il ne parvient pas à égaler la qualité offerte par l'allemande.
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