Citroën BX 14 RE vs Ford Sierra 1.6 GL : deux quadras au style original, dès 1 800 €
Stéphane Schlesinger , mis à jour
Au salon de Paris 1982, deux familiales au design particulier sont lancées, les Citroën BX et Ford Sierra. Profitant d'un Cx similaire, elles diffèrent pourtant par leurs solutions techniques. Mais laquelle choisir pour rouler décalé ?
Les forces en présence
Citroën BX 1.4 (1982-1992) : berline 5 portes, 4 cylindres en ligne, 1,4 l atmo, 72 ch, 900 kg, 163 km/h, à partir de 1 800 €.
Ford Sierra 1.6 (1982-1993) : berline 5 portes, 4 cylindres en ligne, 1,6 l atmo, 75 ch, 965 kg, à partir de 1 800 €.
Voici quarante ans presque jour pour jour, le salon de Paris 1982 accueillait un nombre inhabituel de nouveautés marquantes. Audi 100 C3, Opel Corsa, mais aussi Citroën BX et Ford Sierra. Ces deux dernières frappent un grand coup dans leur catégorie, celle des berlines familiales, en apportant un design ultramoderne. Les Opel Ascona, Peugeot 305, Talbot Solara, VW Passat et autre Fiat 131 prennent un sacré coup de vieux. La Citroën et la Ford, presque opposées techniquement, traction pour la première, propulsion pour la seconde, connaitront un succès certain, de sorte qu’il en reste beaucoup sur le marché à l’heure actuelle. Leurs versions respectives 14 RE et 1.6 GL représentaient le choix équilibré par excellence.
Présentation : looks radicaux et hayon arrière
La BX est la première nouveauté Citroën qui ne soit pas une Peugeot modifiée ou simplement recarrossée. Elle profite d’ailleurs à son lancement en septembre 1982 d’une structure inédite, dont la plate-forme servira plus tard à la Peugeot 405. Pour sa part, la suspension, si elle recourt au système hydropneumatique cher au double chevron, le modernise et le simplifie. Cette base s’emballe d’une carrosserie dessinée chez Bertone par Marcello Gandini, qui sera en grande partie révélée par le concept… Volvo Tundra, en 1979, à la grande fureur de Citroën !
Sous le capot, deux familles de moteurs transversaux sont disponibles. D’un côté, le XY déjà vu dans la 104 ou la Visa, un 1,4 l à arbre à cames en tête, couché et tout en alliage, faisant carter commun avec la boîte de vitesses. De l’autre, elle inaugure l’excellent XU, d’abord en 1,6 l et 90 ch. La 14 RE, version intermédiaire hérite le 1,4 l en 72 ch. Cela peut paraître faible, mais comme l’auto a été conçue dans un souci de grande légèreté (900 kg), ainsi qu'en témoignent son capot et son hayon en composite de plastique, elle se montre vive et pointe à 163 km/h.
A 53 000 F en 1982 (18 600 € actuels selon l’Insee), la BX 14 RE se place bien dans sa catégorie, tout comme son équipement, même s’il paraît indigent selon les normes actuelles : banquette rabattable, montre, rétros réglables de l’intérieur, pré-équipement radio, boîte 5. Pour l’essuie-glace arrière, les vitres électriques ou encore les enjoliveurs de roue intégraux, il faut recourir aux options.
Par la suite, si la gamme BX va largement se développer, la 14 RE n’évoluera pas tellement. Elle est restylée comme ses sœurs en 1986 (look banalisé, mais tableau de bord redessiné, équipement un peu riche – essuie-glace arrière de série – et finition en gros progrès), puis, en 1988, bénéficie du moteur TU apparu avec l’AX en 1986. Bien plus moderne, celui-ci se sépare de la boîte de vitesses, accroît légèrement les performances et abaisse un poil la consommation. A cette occasion l'appellation RE devient TGE. La BX 14 disparaît en 1992, avant les autres versions.
Tout comme la BX, la Ford Sierra se distingue par sa carrosserie au style osé. Préfigurée elle aussi par un concept, le Probe III de 1981, elle a été dessinée par notamment Patrick Le Quément, sous l’égide d’Uwe Bahnsen et étonne par sa fluidité ainsi que ses rondeurs très inusitées à l’époque. Le tout se sanctionne d’un excellent Cx de 0.34, et surtout, ne manque pas d’étonner le public.
En effet, la Sierra est aussi novatrice qu’était conservatrice la Taunus qu’elle remplace. Techniquement, elle demeure, comme celle-ci, une propulsion, mais en troque l’archaïque essieu arrière rigide contre un train indépendant, dérivant de celui de la Granada. Etonnamment, si l’Europe continentale et la France en particulier accueillent bien la Sierra, la Grande-Bretagne, où elle doit trouver son premier marché, la rejette massivement. La clientèle lui préfère la Cortina sortante (appellation de la Taunus outre-Manche), et cet échec relatif outre-Manche coûtera leur place aux designers de la Sierra.
Quoi qu’il en soit, la Ford est d’emblée proposée en 3 et 5 portes avec hayon et en break. La gamme est très complète, comprenant 5 moteurs et 3 niveaux de finition : L, GL et Ghia. Le bloc le plus séduisant en France est alors le 1,6 l de base, un très solide représentant de la famille Pinto, car limité à 7 cv fiscalement. Il développe 75 ch et emmène la Ford à 165 km/h, mais les 965 kg annoncés n’aident pas les performances. En 1.6 GL, elle coûte 54 410 F (19 100 € actuels selon l’Insee), donc se place correctement.
Son équipement est équivalent à celui de la BX 14 RE, donc modeste, mais les options sont plus nombreuses : boîte auto, rétros électriques, ordinateur de bord, siège réglable en hauteur… Par la suite, la Ford ne va guère changer avant 1987, où sa carrosserie est, à l’instar de celle de la BX, revue dans un sens plus classique. Surtout, une variante à 3 volumes (coffre séparé) est alors proposée. La finition GL devient CL en 1989, et la Sierra 1.6 termine sa carrière en 1993 sans grandes modifications, remplacée par la Mondeo.
Fiabilité/entretien : des familiales très endurantes
La BX 14 récupère un moteur éprouvé et très solide, qui se contente d’un entretien simple, d’autant que la distribution s’effectue par chaîne. La boîte tient longtemps également, d’autant qu’elle baigne dans la même huile que le bloc, à condition d’effectuer des vidanges tous les 7 500 km. La triplette de pignon reliant les deux organes prend du jeu, et sa commande peut voir ses dents s’émousser, ce qui gêne alors le passage des rapports.
La suspension hydraulique ne pose pas trop de soucis, mais finit par fuir, phénomène amplifié par le manque d’entretien. A noter que la qualité des durits est meilleure sur les phases 2. Les sphères sont assez simples à remplacer, heureusement. Le liquide LHM doit être clair, sinon, il est à changer (à faire régulièrement) et peut indiquer que la voiture n’a pas été soignée. Les bras arrière prennent également du jeu. La corrosion affecte plus particulièrement les soubassements des modèles d’avant-restylage, dont l’habitacle, très mal fini, résiste moins bien.
Dotée, elle aussi, d’un moteur éprouvé, la Sierra profite d’une belle fiabilité mécanique, même s’il faut changer en temps et en heure la courroie de distribution. Les vidanges d’huile doivent aussi être effectuées à des intervalles rapprochés (moins de 10 000 km), sinon, on sera confronté à une usure prématurée de l’arbre à cames. La boîte se révèle également robuste.
La suspension, classique, vieillit sainement, tout comme l’habitacle, réalisé pour durer longtemps. A la longue, la coiffe du tableau de bord se fend, cela dit. Le principal problème de la Sierra sera la corrosion, qui peut attaquer sévèrement les soubassements.
Avantage : Ford. Plus simple de conception et dotée d’un habitacle plus résistant, la Sierra prend ici l’avantage.
Vie à bord : une Ford plus accueillante
Dans la BX, surtout en phase 1, le style a de quoi déconcerter. Du pur Citroën ! On aime ou on déteste, mais la réalisation laisse franchement à désirer. Cela va bien mieux en phase 2. Heureusement, la sellerie se révèle très confortable et l’espace disponible des plus convenables. La luminosité est très appréciable à l’avant, moins à l’arrière, mais les passagers disposent de vide-poches. Cela ne compense pas un équipement de série franchement limité, hélas.
La Ford Sierra profite d’un tableau de bord joliment dessiné et bien réalisé. La finition de l’habitacle apparaît d’ailleurs tout à fait estimable, alors que les vitres de custode apportent une luminosité bien agréable aux passagers arrière. Etrangement, hormis en hauteur, l’espace disponible reste inférieur à celui de la Citroën, mais la sellerie procure ici aussi un confort appréciable.
Avantage : Ford. Mieux présentée et fabriquée que la BX, la Sierra choie un peu plus ses passagers, en dépit d’un espace disponible légèrement moindre.
Sur la route : étonnante BX
Certains n’apprécient pas la position de conduite de la BX, mais on s’y fait, même si ni le siège ni le volant ne se règlent en hauteur. Le moteur se révèle plutôt bien insonorisé. Souple, il fait aussi preuve d’un entrain assez étonnant vu sa faible cylindrée, d’autant que la boîte, au demeurant très agréable à manier, le soutien idéalement de par son étagement très adapté. Ainsi, la Citroën ne semble jamais sous-motorisée.
Ferme en manœuvre, le volant s’avère suffisamment léger sur route, et précis. Le comportement routier est excellent et ce, quels que soient la charge de la voiture et la météo. Le tout se double d’une filtration des inégalités étonnante. Quant au freinage, il étonne encore par sa réactivité. La BX avait de l'avance !
Dans la Ford, d’emblée, on note la position de conduite mieux étudiée. Au démarrage, le moteur semble lui aussi bien insonorisé, mais rapidement, on perçoit son manque total de vigueur. Certes assez souple, il monte péniblement en régime et n’a pas grand-chose à offrir en reprise, d’autant que la 5 est beaucoup trop longue. En cause, le poids, largement sous-estimé dans les annonces du constructeur puisque les essais d'époque le situent aux alentours de 1 100 kg.
Heureusement, la commande de boîte est plaisante, et on va en user pour relancer la mécanique. Moins ferme que celle de la BX, la direction présente une précision de bon aloi, même si elle est moins rapide que celle de la Citroën. Surprise, la suspension n’a pas tellement à envier à la française côté confort, même si elle contient moins bien les mouvements de tangage et de roulis. La tenue de route est certes saine et sans surprise, mais elle ne vaut pas du tout celle de la BX, surtout sur le mouillé. Heureusement, la Sierra freine très convenablement.
Avantage : Citroën. Plus vive que la Ford, tenant nettement mieux la route et dispensant un confort un peu supérieur, la BX remporte ici une large victoire.
Budget : la Citroën n’est pas seule à monter
Les deux rivales ont vu leur cote grimper ces derniers temps. En bon état, la Citroën demande un minimum de 1 800 €. A ce prix, on fera plus attention à la condition de la voiture qu’à son kilométrage, qui pourra dépasser les 150 000 km. On trouve à 2 200 € des exemplaires très sains pouvant s’en tenir à moins de 100 000 km, alors qu’à 3 000 €, on peut exiger une BX 14 vraiment impeccable.
La Ford Sierra exige des prix très similaires à ceux de la Citroën BX : rien à espérer de sain à moins de 1 800 €. Une belle auto passera aisément les 2 500 €, tant elle sera difficile à dénicher : les amateurs de drift ont réduit nettement le nombre de Sierra d’origine en circulation !
Quant à la consommation, elle est équivalent sur les deux autos en conduite tranquille (environ 7 l/100 km), mais la Ford augmentera bien plus sensiblement son appétit dès qu’on cherchera à ne plus se trainer !
Avantage : Citroën. La BX rafle ici la victoire grâce à sa consommation un peu mieux maîtrisée.
Verdict : la BX sur le fil
La Citroën et la Ford sont à égalité en nombre de victoires. La Ford dorlote plus ses passagers, profite d’une qualité de fabrication avantageuse et d’une conception plus simple, mais la BX réplique par ses prestations routières très supérieures. L’écart est tel qu’il justifie la victoire française au général, car côté budget, les deux autos se marquent à la culotte.
Thème | Avantage |
Fiabilité/entretien | Ford |
Vie à bord | Ford |
Sur la route | Citroën |
Budget | Citroën |
Verdict | Citroën |
> Pour trouver des annonces, rendez-vous sur le site de La Centrale : Citroën BX et Ford Sierra.
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