Depuis 2010, le Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE) est en charge des vérifications des radars non automatisés - jumelles et autres lasers - utilisés par la police nationale et la gendarmerie, quand la société SGS Qualitest Industrie gère – à moins d’un changement très récent - les contrôles de tout le parc des appareils automatiques (cabines et radars embarqués). Éventuellement, le Laboratoire central des industries électriques (LCIE) est le seul autre laboratoire habilité à se charger des contrôles des radars. En clair, sur les procès-verbaux dressés pour sanctionner les excès de vitesse, seuls ces trois protagonistes – et dans un cadre très précis, le fabricant - ne peuvent aujourd’hui être mentionnés en tant que vérificateurs des appareils ayant servi à la constatation de l’infraction. Dans le cas contraire, c’est la nullité du P-V qui peut être tout simplement soulevée !
En effet, seuls les trois organismes susmentionnés restent autorisés par le ministère de l’Industrie à procéder aux vérifications réglementaires des cinémomètres de contrôles routiers (le nom savant des radars) sur les cinq élus du départ. Les Drire, elles, ne sont plus habilitées à s’en occuper depuis plus de deux ans. Théoriquement, elles ne peuvent donc en aucun cas apparaître dans la procédure. Même si en pratique, il arrive encore aujourd’hui que des agents verbalisateurs se trompent et les mentionnent sur les contraventions, soit par manque de formation ou d’information, soit par habitude.
Les Drire ont en fait disparu tout début 2010, et les agents des poids et mesure ont été intégrés aux nouvelles Direccte**, à l’intérieur desquelles ils auraient pu rester compétents pour vérifier les radars, si ces contrôles réglementaires n'avaient pas été entre-temps privatisés et des organismes désignés par le ministère de l’Industrie (art. 20 de l’arrêté du 4 juin 2009)... En moins de quatre mois, Bercy en a ainsi accrédité cinq :
- - La Cete Apave Sudeurope et le LNE, le 18 décembre 2009,
- - SGS Qualitest Industrie, le 31 décembre 2009,
-
- Le LCIE, le 19 février 2010 et
- - Thomas Hugo Conseil (THC), le 29 mars 2010.
Ces cinq organismes pouvaient alors être accrédités pour procéder aux trois types de vérification que doivent subir les radars selon la réglementation :
- La primitive, c’est-à-dire celle qui intervient avant la première utilisation de l’appareil neuf ou réparé et la seule à pouvoir être dans un cadre bien particulier effectuée par le fabricant. En l'occurrence, seul Morpho (ex-Sagem) a aujourd'hui cette capacité.
- La périodique, correspondant à l’examen annuel (également appelée « contrôle en service »).
- La vérification de l’installation, prévue uniquement pour les cabines.
Sur les cinq protagonistes, seul THC, société très récente et donc totalement inconnue, n'a pas décroché son sésame pour l'ensemble de ces contrôles, mais seulement pour les deux premiers. De toute façon, la nature de la vérification n'est jamais indiquée sur les P-V. La seule possibilité pour s'assurer du bon entretien des cinémomètres est de réclamer leur carnet métrologique, sorte de carnet de santé, normalement attaché systématiquement à chaque appareil... En théorie, un document « communicable à toute personne qui en fait la demande »*** (par forcément verbalisée donc). En pratique, l'administration rechigne à le transmettre et quand elle s'y résout, elle n'en fournit généralement qu'une copie partielle.
Dès l’été 2010, l’Apave jette l’éponge et demande la cessation de sa désignation, faute d’obtention d’un contrat avec l’utilisateur des radars, autrement dit l'État. Le 13 février dernier, c’est au tour de THC de se mettre en retrait, pour les mêmes motifs vraisemblablement. C’est pourquoi il ne reste plus aujourd’hui que trois organismes capables de procéder à l’étalonnage des radars. Et il ne serait pas étonnant que le LCIE ne se décide bientôt lui aussi, faute de clients, à se retirer de la partie. En attendant, concernant le vérificateur des radars automatiques, il peut subsister quelques doutes, puisqu'il est directement recruté par Morpho, fournisseur de la quasi-totalité des quelque 3.000 radars automatisés en service actuellement, ce qui paraît bien sûr contraire aux textes en vigueur...
Compte tenu de l’opacité régnant déjà sur le sujet, ce marché passé de privé à privé, en dehors de toute obligation vis-à-vis du code des marchés publics, est loin de permettre le suivi en toute transparence du renouvellement annuel du contrat ! Pour la troisième année consécutive, le choix de Morpho pourrait se porter sur SGS Qualitest Industrie. La situation a le mérite d’être plus claire concernant les autres 3.000 radars lasers - non automatiques - des gendarmes et des policiers, puisque le marché a bien été attribué par le ministère de l’Intérieur au LNE jusqu’au 28 avril 2014. Enfin, pour ce qui est des appareils utilisés par les polices municipales, c’est également le LNE qui superviserait leur vérification, grâce à des conventions passées avec la police nationale.
* Directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l’environnement.
** Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi.
*** De nombreux avis de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) ont été rendus en ce sens à Maître Caroline Tichit.
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