Qui est Luca de Meo, le nouveau patron de Renault ?
Florent Ferrière , mis à jour
Son arrivée avait été annoncée fin janvier, mais Luca de Meo a dû attendre le 1er juillet pour devenir le directeur général de Renault. Avec cet Italien jovial ayant une très grande expérience dans l'industrie automobile, qui a notamment œuvré au redressement express de Seat, le Losange tourne la page Ghosn.
Il était très attendu. Luca de Meo devient enfin le directeur général de Renault. Sa nomination avait été validée fin janvier par le conseil d'administration du Losange mais de Meo a dû patienter un peu plus de cinq mois. Il était jusqu'à début janvier à la tête de Seat, un poste duquel il a démissionné. Renault a dû gérer le rachat de sa clause de non-concurrence auprès du groupe Volkswagen, qui aurait été gourmand financièrement. Il faut dire que l'allemand voit partir un grand talent.
Ces derniers mois, l'intérim a été assuré par Clotilde Delbos. Elle le faisait même depuis octobre 2019 et le débarquement de Thierry Bolloré, le précédent directeur-général. Dès la confirmation du départ de Bolloré, Renault ne l'avait pas caché : il souhaitait prendre son temps pour lui trouver un remplaçant. La marque a notamment fait appel à des cabinets de chasseurs de têtes, avec un cahier des charges très ambitieux : une personne avec une excellente connaissance du monde de l'automobile, dotée d'une solide expérience, capable de tenir les rênes d'une grosse machine tout en renouant les liens avec Nissan, et qui véhicule une image rassurante pour l'État français.
Renault a privilégié le recrutement externe pour avoir quelqu'un avec un œil neuf. Le Losange ne s'interdisait rien, pas même la possibilité d'avoir une personne non Française à sa tête. Et c'est donc ce qui arrive, puisque Luca de Meo est italien, mais très francophile.
Né en 1967, Luca de Meo est diplômé en administration des affaires à l'Université Commerciale Luigi Bocconi de Milan. Il a près de trente ans d'expérience dans le monde de l'automobile. Son CV est très riche, puisqu'il a connu quatre grands groupes. En 1998, il était chez Toyota Europe. En 2002, il a filé chez Fiat, devenant responsable des marques Fiat, Lancia et Alfa Romeo. Il a notamment œuvré au lancement de la nouvelle 500, énorme carton commercial. Il a été nommé directeur marketing de Fiat en 2007. En 2009, comprenant que Sergio Marchionne ne lâcherait jamais les rênes de Fiat, il est allé chez Volkswagen, puis a pris la direction du marketing d'Audi. Il est devenu le patron de Seat en 2015, avec à la clé un joli bilan, les ventes de la firme espagnole ayant été boostées sous son mandat.
Le quatrième grand constructeur qu'il a connu, c'est celui du début, c'est Renault. C'est chez le Losange qu'il a commencé sa carrière dans l'automobile, puisqu'il a rejoint la filiale italienne en 1992. C'est donc un retour aux sources ! Le 19 juin, lors de l'assemblée générale du groupe français, Luca de Meo (qui a eu l'accord de VW pour s'exprimer brièvement en avance) a déclaré : "Je reviens d'abord pour le challenge, redresser l'un des plus grands et des plus prestigieux constructeurs automobiles".
L'avantage d'un tel parcours, c'est que Luca de Meo, qui a travaillé dans une douzaine de pays, est polyglotte, parlant français, italien, allemand, anglais et espagnol. Il lui faudra maintenant apprendre le japonais pour œuvrer à la relance de l'Alliance ! On lui connaît surtout un management ferme mais mesuré. Un ancien collaborateur a récemment déclaré dans le Parisien : "le coup de gueule pour affirmer son autorité, ce n'est vraiment pas son truc. Il préfère l'asseoir en puisant dans sa très grande expérience du secteur, pour argumenter avec son interlocuteur. Il sait ce qu'il veut mais il prend le temps qu'il faut pour l'expliquer".
Toujours le sourire aux lèvres, Luca de Meo aime le football et la musique électronique, racontant souvent qu'il aurait pu devenir DJ. Un ami a confié en début d'année au Figaro que de Meo passait aussi aux fourneaux : "Quand tu vas dîner chez lui, c’est lui qui cuisine les pâtes, choisi le vin, exclusivement italien, et vient râper la truffe du Piémont, qu’il fait venir d’Italie, dans l’assiette de chaque invité".
Avec Luca de Meo, associé au président Jean-Dominique Senard, venu de Michelin, Renault veut tourner la page Ghosn. Luca de Meo est d'ailleurs une personnalité très différente. Alors que Ghosn était le symbole du dirigeant froid, Luca de Meo fait preuve d'un "enthousiasme indéboulonnable", selon un ancien collaborateur cité par le Parisien. Il est surtout passionné par l'auto et la moto, ce qui semble logique… mais dont on pouvait douter avec Ghosn.
Le point commun qu'on peut lui trouver avec Ghosn est lié au contexte : il semble être attendu comme le sauveur, l'homme providentiel. Renault est en mauvaise passe, avec des ventes en baisse et des finances dans le rouge. D'ailleurs, Jean-Dominique Sénard et Clotilde Delbos ne l'ont pas attendu pour présenter fin mai un gros plan d'économies. Le Losange souhaite réduire ses coûts fixes de deux milliards d'euros d'ici trois ans, avec notamment la suppression de 15 000 emplois dans le monde.
Mais Jean-Dominique Senard et Clotilde Delbos laissent à De Meo la réflexion sur l'avenir des marques. Vu comme un as du marketing, le nouveau directeur général va ainsi devoir définir l'évolution de Renault, Dacia et Alpine. S'il a eu cinq mois pour réfléchir, il devrait encore se laisser quelques semaines pour élaborer la stratégie de reconquête. Il est plutôt confiant, s'étant déjà montré enthousiaste sur les nouveautés en préparation. Lors de l'assemblée générale, il a promis aux actionnaires "une des meilleures surprises de retournement de situation".
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