L'Assemblée nationale met un coup de canif à la fin des voitures thermiques
L'INFO DU JOUR - Surprise : le Parlement a rejeté la transposition de la directive européenne imposant la fin de la voiture thermique au 1er janvier 2035. Pour autant, ce mini-putsch contre Bruxelles aura-t-il des conséquences ?
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C’est la règle. Lorsque Bruxelles émet une directive, elle doit être transposée dans le droit national des pays membres. C’est en principe une pure formalité, sauf que, parfois, l’Assemblée nationale française adore faire des coups d'éclat et des mini-putschs, qui permettent de faire passer, ou de refuser, un texte faute de combattants.
C’est précisément ce qui s’est passé ce 17 février ou un hémicycle disparate de 64 députés sur un total de 577 s’est vu proposer, au travers d’un vote simple, la transposition dans le droit français de la fin de la voiture thermique au 1er janvier 2035, un texte déjà voté au Parlement européen et approuvé par la Commission qui, donc, ne souffre pas de la moindre objection, puisqu’il est déjà formellement adopté par les pays membres.
34 contre, 30 pour
Or, cette pseudo-formalité s’est vue retoquer par 34 voix contre la transposition de la directive et 30 pour. Parmi ceux qui ont refusé la fin du thermique, on compte une grande majorité d’élus du RN, et quelques LR. Quant à ceux qui l’ont approuvé, on retrouve une alliance rare et de circonstance entre les députés macronistes, écologistes et insoumis.
Interrogé par l’AFP, l’élu du RN de la Somme Matthias Renault a justifié son vote par « le coût inabordable de la voiture électrique pour les ménages modestes ». Le député Rassemblement National ayant visiblement un talent de prospectiviste économique lui permettant de connaître le prix d’une auto avec 10 ans d’avance.
Danielle Brulebois quant à elle est plus pragmatique. La députée Renaissance, qui est allée à l’encontre de l’avis de son groupe et du gouvernement en refusant la transposition, a justifié son refus par les discussions toujours en cours à Bruxelles et la clause de revoyure fixée en 2026. Une politique du wait and see.
Pour autant, qu’elle est l’importance d’un tel vote ? Un refus à l’Assemblée est loin, très loin, de signifier la fin de la mesure en France. Car le droit européen est formel. Si une directive n’est pas transposée dans le droit national d’un pays membre, celui-ci s’expose à ce que ses citoyens se retournent contre l’État pour la faire appliquer puisque la législation de Bruxelles prévaut sur les textes nationaux.
En outre, dans certains pays, la transposition des directives est une obligation constitutionnelle. Et c’est le cas de la France. En somme, le vote négatif du 17 février a 100 % de chances d’être retoqué par les Sages.

Reste que ce coup de force d’un hémicycle quasi désert est un signe, celui d’une volonté de plus en plus affirmée d’aller à l’encontre de ce texte venu de Bruxelles, et ce dans de nombreux pays d’Europe. Le ministre de l’Industrie et de l’Énergie, Marc Ferracci, qui défend l’objectif de 2035 a beau s’auto-convaincre en expliquant que l’ensemble de la filière automobile « s’est mis en mouvement » et qu’elle « ne demande pas à remettre le texte en question », les doutes exprimés par les constructeurs réunis au sein de l’ACEA et par les dirigeants allemands, Italiens et ceux des pays de l’Est écornent encore un peu plus une mesure controversée depuis qu'elle est née.
Une directive bombardée de toutes parts
À ces doutes s’ajoute la concertation lancée par Ursula von der Leyen dont les conclusions doivent être remises dans un mois. Si 2035 n’est pas le seul sujet de ces réunions qui ont débuté au mois de janvier, puisqu’il y est question des réductions d’émissions et du sort des constructeurs chinois, 2035 figure forcément à l’ordre du jour. Sans compter sur la revoyure évoquée par Danielle Brulebois.
Autant d’éléments et de coups de boutoir contre la directive qui font que quelle que soit l’issue des tractations à venir, elle pourrait ne pas s’en relever indemne, tout comme l’ensemble du Green deal voulu par Bruxelles qui, de l’agriculture durable, aux énergies renouvelables en passant par la neutralité carbone en 2050 est de moins en moins en vogue.
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