Et si Renault était plus fort que Nissan ?
Endetté, vendu par tranches, le groupe Renault a connu des jours plus glorieux. Pourtant, les agences de notation, et derrière elles, les marchés, croient dur comme fer en l'avenir de l'ex-régie, et au plan ambitieux de Luca de Meo. Ils considèrent même que le grand perdant de la mini-Alliance redessinée il y a quelques jours n'est pas Renault, mais bel et bien Nissan.
On ne donnait pas très cher de sa peau. Après son alliance réduite au minimum avec Nissan, sa dette envers l’État qu'il n'a pas fini de rembourser, sa partition en deux entités ouvertes aux Chinois comme aux Saoudiens et ses déboires russes, on avait tendance à craindre le pire pour l’avenir de Renault. Et on avait peut-être tort. Car voilà que, coup sur coup, les deux plus grosses agences de notation mondiales, Fitch et Standard & Poors, qui font la pluie et le beau temps sur les marchés financiers, ont tous les deux relevé la note du losange, qui se retrouve, comme à l’école, avec les encouragements au bas de son bulletin de notes trimestriel.
Nissan mal parti sur l’électrique
Mais qu’est ce qui a amené les deux baromètres de la bourse mondiale à reconsidérer subitement leurs positions sur Renault qui a toujours été vu comme le maillon faible de l’Alliance face au puissant Nissan ? Les analystes ont bien entendu pris en compte un certain nombre d’éléments qui les ont conduits à ce retournement de situation. Car pour eux, ce n’est pas Renault qui est aujourd’hui le cancre de l’Alliance, ou ex-Alliance, mais bel et bien Nissan. Pour les agences, le Japonais est plutôt mal parti. Comme l’a expliqué un représentant de Standard & Poors à Automotive News, "nous ne sommes pas certains que Nissan sera en mesure de s'implanter sur le marché mondial des véhicules électriques, qui connaît une croissance rapide".
Il est vrai que la pauvreté du catalogue actuel de Nissan en Europe, fief de l’électrique aujourd’hui et dans le futur, malgré les atermoiements allemands, n’encourage pas les marchés à miser sur le cheval japonais. De plus, l’intégration de Nissan Europe dans une vaste région qui comprend également l’Afrique, le Moyen-Orient, l’Océanie et même l’Inde, (en gros tout ce qui n’est pas le Japon et les États-Unis) ne témoigne pas d’un attachement très profond au vieux continent et à son marché très spécifique.
Et demain ? Lorsque l’on examine les nouveautés à venir chez nous courant 2023, on s’aperçoit que le réseau Nissan n’aura pas grand-chose à se mettre sous la dent. Seul lancement prévu : l’utilitaire Townstar Combi en version longue, un cousin du Renault Kangoo. C’est peu. Il faudra attendre un an de plus pour découvrir la nouvelle Leaf qui n’aura plus rien à voir avec la compacte d’aujourd’hui, et se renouvellera sous la forme d’un SUV, conçu sur la base de la plateforme CMF-EV, de la Renault Megane. Quant à la nouvelle Micra, 100% électrique, elle apparaîtra en 2025, et elle aussi sera fabriquée sur une base Renault, celle de la future R5. On le voit, aujourd’hui le Japonais est dépendant de son ancien cousin français et de sa technologie, et non l’inverse.
Un gros changement pour celui qui, avec sa Leaf était pourtant l’archi leader de la voiture électrique de par le monde. Mais ça, c’était avant, dans les années 2010. Depuis, toutes les marques se sont lancées sur ce marché, sans que Nissan ne consolide sa position de pionnier. Ces éléments, et ce retard, ont évidemment été pris en compte par les analystes de Fitch et de Standard & Poors lorsqu’ils ont décerné un bonnet d’âne au Japonais. Mais pourquoi avoir offert leurs félicitations à Renault ? Pour des raisons exactement inverse.
Nissan à la baisse, Renault à la hausse
S l’ex-régie était, et d’une certaine manière, est toujours, dans une passe délicate, le moins que l’on puisse dire, c’est que le constructeur, et son nouveau boss, n’ont pas joué les belles, mais pauvres, endormies. Luca de Meo se démène. La maison est endettée ? Il est allé chercher de nouveaux investisseurs. Ils sont Chinois ou Saoudiens ? Il n’en fait pas un symbole. L’automobile mute comme elle ne l’a jamais fait ? le groupe Renault aussi. Au cours des deux prochaines années, de Dacia à Alpine en passant par le losange évidemment, ce ne sont pas moins de 20 nouveaux modèles qui sont attendus.
C’est cette différence de promesses que les agences ont salué. D’un côté un constructeur japonais aux reins solides, mais qui ne fait rien pour les conserver en bonne santé. De l’autre un constructeur français qui s’active pour sortir de la mouise. Cette bonne note a d’ailleurs déjà été saluée par les marchés, et la courbe du « petit » Renault est en train de monter et pourrait bientôt croiser celle du « gros » Nissan qui est en train de plonger. Reste que les marchés sont volatils, qu’une situation donnée peut évoluer très vite et que les cotations ne sont pas seulement établies en fonction de la forte motivation d’un dirigeant, mais aussi en fonction de ses résultats.
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