Commençons avant tout par le nom qui a déjà droit à sa petite histoire. Lorsque la maison-mère a dévoilé comment serait baptisée l'Audi R8 électrique, les antennes francophones européennes de la marque, tant française que belge, sont bien sûr vigoureusement montées au créneau. Las, la décision était prise et il était déjà trop tard pour revenir en arrière : elle répondra donc au nom d'e-tron, à prononcer i-tronne, ce qui, selon les RP du constructeur allemand, n'est pas pire qu'une Alfa-Romeo Mito ou une Citroën C-Zéro. Sauf qu'on ne choisit pas une citadine ou une compacte pour les mêmes raisons qu'une voiture de sport. Passons.
L'e-tron, c'est donc un châssis de R8 d'où on aurait extrait le V8 ou le V10 pour le remplacer par 550kg de batteries lithium-ion refroidies par eau rechargeables en six à huit heures. Ces dernières alimentent quatre moteurs asynchrones, un pour chaque roue, délivrant au total jusqu'à 230 kW, soit 313ch, et un couple colossal de 4500 Nm. Dans les faits, ces derniers chiffres sont des pics accessibles brièvement, la puissance continue s'établissant à 184 kW, soit 250ch et le couple se limitant à 600 Nm pour préserver une autonomie promise d'environ 250 km. Au final, le 0 à 100 km/h est annoncé en 4,8s et la vitesse maximum est de 200 km/h.
Côté châssis, on n'altère pas une recette qui a fait ses preuves : la répartition des masses reste à 48:52 et le poids à 1600 kg, des chiffres identiques à ceux de la R8 V10 et la puissance, comme pour ses sœurs thermiques, est envoyée à 70% à l'arrière et 30% à l'avant dans des conditions normales.
Voilà pour la théorie, passons maintenant à la pratique. Les quelques e-tron produites sont des mulets de développement construits sur la base des R8 thermiques, c'est la raison pour laquelle le modèle que nous avons eu la chance d'essayer brièvement n'est pas esthétiquement conforme aux concept-cars que vous avez pu découvrir l'année dernière en rouge au Salon de Francfort puis en orange au Salon de Los Angeles. Mais dans le détail, cette R8 bien particulière présente quelques savoureuses modifications extérieures, comme le cache tout en carbone en lieu et place de la véritable vitrine qui donne normalement sur le moteur thermique ainsi que l'important diffuseur arrière d'où ne sort aucun échappement.
Il s'agit en fait une véritable voiture de course qui a participé et remporté cet été la Silvretta E-auto Rally Montafon, un rallye réservé aux voitures électriques, où elle a damé le pion aux autres participantes pourtant très sérieuses que sont la Tesla Roadster 2.5 ou la Mercedes SLS AMG E-Cell. Et l'ambiance à bord a tôt fait de vous rappeler ses origines avec d'abord un baquet Recaro à dossier fixe qui sent bon la compétition et une direction particulièrement lourde.
« Des performances de moto »... ces paroles d'un ingénieur Audi résonnent encore dans ma tête quand le moment vient d'appuyer sur le bouton on. Après être sorti de l'aire de stationnement dans un silence seulement troublé par les grincements des larges pneus, une longue parabole s'offre à moi alors que la nuit vient de tomber. Mes phalanges se crispent et mon pied droit s'allonge. Un torrent de couple déferle, parfaitement maîtrisé et avec une progressivité bien éloignée de la sauvagerie à laquelle nous sommes en droit d'attendre de telles valeurs de couple. Comme sur l'A1 e-tron, des palettes derrière le volant permettent d'augmenter ou de diminuer la puissance du frein moteur. Le précédent journaliste l'ayant mise sur 1, la plus faible, c'est quasiment en roues libres que je me retrouve à l'approche des cônes oranges signalant l'épingle en bout de ligne droite mais les excellents freins hérités de la R8 V10 évitent toute situation embarrassante au volant de ce prototype qui n'a véritablement pas de prix.
Une dernière ligne droite s'offre avant l'entrée au stand, une ultime occasion d'enfoncer la pédale de droite. Malheureusement, les précédentes accélérations ayant visiblement tari les possibilités d'overboost, la poussée s'avérera beaucoup moins franche.
Que penser de cette Audi e-tron ? En l'état actuel des choses, avec un prototype loin d'être finalisé et une expérience de conduite aussi courte, il paraît prématuré de donner un avis définitif alors que sa sortie n'est prévue qu'à la fin 2012. Au delà du discours commercial, les performances paraissent aujourd'hui tout de même un peu justes pour une GT dans une catégorie où elle devra d'abord convaincre par rapport à ses concurrentes thermiques, ces dernières ayant déjà une longueur d'avance sur un élément de séduction non négligeable pour une voiture plaisir : le bruit.
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